Essai comparatif CFMOTO 450SR TC vs Aprilia RS 457 : la plus rapide sur un tour
Les motos sportives de moyenne cylindrée sont « tendance », comme on dit. Presque toutes les marques ont dans leur gamme un petit bolide destiné à convaincre les motards expérimentés d’opter à terme pour le modèle sportif phare de la marque correspondante. Deux nouvelles venues intéressantes sont l’Aprilia RS 457 et la CFMOTO 450SR TC. Mais s’agit-il de véritables motos sportives ou plutôt de motos de route à l’allure sportive ? Nous nous sommes rendus dans les Ardennes à leur guidon pour trouver la réponse.
Texte : Jelle Verstaen
Photos : Jarno van Osch
Avertissement
Avant de commencer, un petit avertissement s’impose. Contrairement à ce que le titre pourrait laisser penser, nous n’avons pas cherché à réaliser le meilleur temps possible lors de ce test. Ce n’est en effet pas autorisé sur la voie publique. Nous avons même à peine dépassé les limites de vitesse légales… à l’exception de quelques sprints courts. Nous ne sommes pas plus saints que le pape. Mais l’objectif principal de ce test était surtout de voir quelle moto sportive tire son épingle du jeu dans toutes les situations possibles sur la voie publique. Elles ont beau avoir l’air athlétiques, la réalité est qu’elles passeront 95 % de leur temps sur la route et ne frôleront les bordures que sporadiquement. Ou ont-elles tout de même plus à offrir ?
Le « circuit »
Le parcours commence juste à l’extérieur du centre du village pittoresque de Houffalize et nous emmène pendant 19,8 kilomètres au cœur du Luxembourg belge. Nous démarrons par un run qui passe sous la E25 pendant 1,8 kilomètre en ligne droite, une ligne droite qui ferait pâlir d’envie le circuit de Catalogne. Près de Vellereux, nous mettons le cap vers le nord et slalomons un moment en direction de Bonnerue. Nous entamons ensuite une descente parfaitement asphaltée et délicieusement sinueuse en direction de Grande Mormont. Après avoir traversé un petit pont au-dessus de l’Ourthe, nous serpentons à nouveau avec la rivière tumultueuse en direction d’Houffalize. De là, il ne nous reste plus qu’à gravir la côte de Mabompré, avec l’arrivée sous le pont de l’autoroute reliant Arlon à Visé. Un circuit court, mais très agréable, tant pour les motards (bien élevés) en herbe que pour les amateurs de balades tranquilles.
Sur la grille de départ
Pendant que nous alignons les concurrentes avant le départ, nous prenons le temps de les inspecter de près. De loin, l’Aprilia RS 457 pourrait être confondue avec sa grande sœur, la RS 660, avec ses lignes extrêmement séduisantes et ses finitions très soignées. De la magnifique signature lumineuse à l’avant et à l’arrière, aux graphismes « surdimensionnés » judicieusement placés sur toute la carrosserie, en passant par le cadre en aluminium mis en valeur. Une moto absolument magnifique. Tous les câbles et tuyaux sont soigneusement dissimulés et le plastique semble solide. La 457 offre également des possibilités de réglage pour les suspensions, un té de fourche habilement fraisée, un système ride-by-wire et des aides à la conduite, ainsi qu’un petit écran TFT derrière le carénage. Pour repérer les inévitables raccourcis budgétaires, il faut l’examiner de très près : la pompe de frein avant un peu chétive, par exemple, ou les pneus indiens Eurogrip qui chaussent cette mini 660.
Nous n’aurions jamais pensé écrire cette phrase, mais l’Aprilia semble plutôt discrète à côté de sa challenger d’aujourd’hui. La 450SR TC arbore en effet un ensemble d’ailettes sur l’avant qui ne dépareraient pas sur un Cessna lors des vérifications prévol. CFMoto a basé son nouveau modèle sur la moto conceptuelle SR-C21, qui a vu le jour en 2021 à l’EICMA et a fait sensation dans le monde entier. Mais la peinture gris-noir brillante est également très bien appliquée, les autocollants sont soigneusement dissimulés sous une couche de vernis et les détails rouges offrent un contraste très réussi. Les étriers Brembo à quatre pistons montés radialement complètent le tableau, mais le motif imitation carbone nous plaît moins. Enfin, les deux motos sont équipées d’écrans TFT de 5 pouces : Aprilia propose un design plus sobre et plus net. CFMoto mise sur des graphismes colorés et une connectivité smartphone de série, tandis qu’Aprilia ne propose cela qu’en option (module MIA).
Prêts pour le départ…
Casque posé sur le réservoir, coudes écartés et pieds bien ancrés sur l’asphalte, nous nous préparons pour le départ. Une pression sur les boutons de démarreur ne fait pas rugir les moteurs à travers les forêts ardennaises comme dans un Grand Prix MotoGP, mais les deux machines tiennent bon, chacune à leur manière. Le cœur de la RS 457 est un bicylindre parallèle avec un intervalle d’allumage de 270°. La petite italienne développe 47,6 ch à 9 400 tr/min et 43,5 Nm à 6 700 tr/min, soit bien en dessous de la limite A2 de 35 kW. Selon Aprilia, plus des quatre cinquièmes du couple sont déjà disponibles à partir de 3 000 tr/min. Une puissance agréable à bas régime, c’est toujours bon à prendre ! Le moteur utilise la technologie de la RS 660 : cylindres décalés pour réduire les frottements, axes de piston revêtus de DLC, arbre d’équilibrage monté sur roulements à aiguilles et refroidissement et lubrification intégrés compacts. L’embrayage à assistance anti-rebond empêche la roue arrière de rebondir en cas de rétrogradage trop rapide, et le système Ride-by-Wire offre trois modes de conduite (Sport, Rain et Eco), ainsi qu’un contrôle de traction réglable. Un quickshifter est disponible en option, et il est monté sur notre moto d’essai.
La CFMoto 450SR TC est un peu plus calme : avec 46 ch et 39 Nm, elle semble un peu moins puissante sur le papier. Pourtant, la chinoise est équipée d’un bicylindre parallèle similaire callé à 270°, avec double arbre d’équilibrage et embrayage assisté FCC. La poignée d’accélérateur à câble offre un mode de conduite unique, mais cette version est équipée d’un contrôle de traction. Sur le papier, l’Aprilia semble être la plus moderne et la plus puissante sur la grille de départ. Reste à voir si cela se vérifie dans la pratique.
… et c’est parti !
Les moteurs sont à température, le régime augmente, le levier d’embrayage est tiré à fond. Encore un instant, et… c’est parti ! Pendant un bref instant, le caoutchouc crisse sur l’asphalte, jusqu’à ce que le contrôle de traction intervienne sur les deux machines. Mais dès les premiers centimètres, l’Aprilia RS 457 montre pourquoi les Italiens ont 54 titres mondiaux à leur actif. En mode Sport, la RS réagit avec une précision chirurgicale à la poignée de gaz. Le moteur monte en régime de manière linéaire et continue à tirer avec puissance jusqu’à atteindre la limite. Les vibrations sont réduites au minimum, le son est plein et agréablement sombre, avec ce caractère « V-twin » typique qui fait la renommée des bicylindres parallèles à 270°. Le quickshifter passe les vitesses avec vivacité et précision.
En raison de sa réponse un peu plus lente à l’accélération et de sa montée en puissance plus progressive à bas régime, la CF démarre nettement plus lentement, ce qui permet à l’Aprilia de prendre immédiatement une belle avance. Mais… la petite chinoise rattrape largement son retard un peu plus loin. Entre 8 000 et 10 000 tr/min, le moteur de la CFMoto prend tout son sens, avalant goulûment les tours et permettant aux deux motos de se rapprocher à nouveau. L’Aprilia l’emporte toutefois avec quelques longueurs d’avance, mais cela est principalement dû à son démarrage vif et à sa puissance à mi-régime.
Centre urbain
À l’approche de l’agglomération, le rythme ralentit et nous avons le temps d’examiner la position de conduite. Car celle-ci diffère considérablement, malgré une silhouette et une ergonomie similaires. Sur la CFMoto 450SR TC, on s’enfonce un peu plus profondément dans la moto, avec une position sportive relativement confortable, même si les repose-pieds (compte tenu de la selle assez basse, 795 mm) semblent assez hauts et éloignés vers l’avant. La protection contre le vent est excellente et le réglage légèrement plus souple des suspensions assure une conduite agréable. Le jour du test, j’ai parcouru environ 300 kilomètres sur la SR (avec l’aller-retour à Houffalize) et je suis descendu de la moto à la fin de la journée avec le sourire. Prêt pour une autre escapade. Cependant, les réglages standards légèrement plus souples ont quelques conséquences en termes de précision de conduite par rapport à l’italienne, nettement plus rigide.
L’Aprilia RS 457 offre quant à elle une sensation beaucoup plus spacieuse en selle. Les genoux s’adaptent naturellement aux renfoncements du réservoir, le guidon est légèrement plus haut et la position de conduite est sportive sans être extrême. Remarque : lorsque vous voulez tourner dans une rue, vous atteignez très vite la limite du rayon de braquage. Vos mains se retrouvent alors coincées entre le réservoir et le guidon, et vous pouvez à peine actionner la poignée des gaz et/ou le levier d’embrayage. Cela ne se remarque pas beaucoup lors d’un trajet normal, mais d’autant plus lors d’une séance photo avec plusieurs passages au même endroit.
Des virages plus rapides
Le deuxième secteur du circuit d’Houffalize consiste en une succession de virages sur un terrain vallonné, avec des dénivelés et différents revêtements. Un véritable régal pour le châssis, que la RS 457 est la première à pouvoir aborder.
Alors que nous enchaînons les virages, nos attentes se confirment : l’Aprilia RS 457 est clairement dans son élément. Le cadre en aluminium, avec le moteur comme élément porteur, confère à l’ensemble une sensation d’extrême rigidité. La fourche inversée de 41 mm, le mono-amortisseur (tous deux réglables en précharge) et le bras oscillant en acier constituent une base rigide, ce qui permet à la RS de prendre les virages avec beaucoup de précision. La roue avant vous transmet beaucoup d’informations et le moteur suit sans hésitation et en toute stabilité la trajectoire choisie. Pas d’hésitation dans la réponse de la poignée d’accélérateur, un châssis stoïque… Que demander de plus en tant que jeune pilote ? Le revers de la médaille : sur un revêtement plus rugueux, comme on en trouve souvent en Belgique (euphémisme du jour), cette rigidité se fait également sentir. Chaque fissure ou bosse du revêtement se ressent dans les poignets, les fesses et le bas du dos. Ceux qui veulent aller vite sont donc récompensés sur l’Aprilia. Ceux qui sortent la RS 457 du garage pour une petite balade tranquille devront s’accommoder de courbatures.
Ou… opter pour la CFMoto. En effet, le cadre en tubes d’acier de la moto chinoise offre une flexibilité nettement supérieure, ce qui la rend plus tolérante et globalement plus agréable à conduire, avec une plus grande polyvalence si vous préférez. Dans les virages rapides successifs, nous apprécions son faible poids en ordre de marche de seulement 170 kg (contre 175 kg pour l’Italienne). Malgré la fourche non réglable, la 450SR TC reste parfaitement équilibrée, et nous n’avons rien à redire sur les réglages usine globalement confortables du mono-amortisseur. Les pneus ne sont pas non plus à critiquer aujourd’hui : ni les CST de la CFMoto, ni les pneus Eurogrip de l’Aprilia ne commettent la moindre erreur. Malgré les bandes d’asphalte sèches et bien réchauffées, le sol est assez humide sous le feuillage dense entre Bonnerue et Grande Mormont. Nous ne constatons aucune amorce de glissade (grâce notamment à la puissance limitée et au TC lors de l’accélération, bien sûr). Parfait.
Sur les freins
Lors de la descente vers la vallée de l’Ourthe, la puissance de freinage et la stabilité des deux machines sont mises à rude épreuve. La CFMoto continue d’impressionner. Une fois passé le jeu initial dans le levier de frein, l’étrier radial Brembo mord avec puissance et de manière très prévisible dans le grand disque de 320 mm. Même en freinant de manière répétée et prolongée, la pression reste constante. Chapeau bas. Seul le système ABS aurait pu intervenir un peu plus tard à notre avis. L’Aprilia RS 457 freine tout aussi puissamment, avec une configuration radiale très similaire de ByBre, filiale de Brembo. La puissance de freinage reste excellente en toute circonstance, même si l’on pouvait sentir un léger fading en cas d’utilisation fréquente. Pas de folies et une puissance de freinage largement suffisante pour une utilisation sur route, mais faut-il pour autant envisager une longue journée sur circuit ? Le mode duo de l’ABS (route ou circuit) est pratique, mais en mode route, il intervient un peu trop rapidement, tout comme chez sa concurrente d’aujourd’hui.
Juste avant de traverser le pont sur l’Ourthe, l’Aprilia freine brusquement… pour être ensuite dépassée par la CFMoto, qui prend immédiatement une demi-longueur d’avance. L’Aprilia RS 457 parviendra-t-elle à revenir dans la dernière section de virages, la CFMoto 450SR TC s’envolera-t-elle ou aurons-nous droit à un photo-finish ?
Remise des prix
Pendant que nous envoyons la photo d’arrivée au laboratoire, nous pouvons déjà dresser la liste de nos conclusions. L’Aprilia RS 457 donne l’impression d’être une véritable moto sportive dotée d’un ADN racing. Une moto magnifique, qui exige finesse et engagement de la part du pilote, mais qui le récompense par ses trajectoires ultraprécises, ses performances fougueuses et son caractère affirmé. Le son, le comportement routier et la qualité de construction font honneur à une marque légendaire comme Aprilia. La RS 457 est moins confortable, mais ceux qui roulent pour le plaisir seront sans aucun doute conquis.
La CFMoto 450SR TC surprend quant à elle par son ensemble très abouti et complet. Elle est solide, bien finie et allie confort et sportivité d’une manière idéale pour les conducteurs A2. En termes de confort de conduite, de freinage et de rapport qualité-prix, ce modèle obtient d’excellents résultats. Le moteur est puissant (surtout à haut régime), mais il lui manque un peu du tempérament qui rend l’Aprilia si attrayante.
Au final, la différence de prix entre les deux modèles n’est que de 500 euros, en faveur (bien sûr) de la CFMoto. Il ne vous reste plus qu’à répondre à une seule question : êtes-vous sportif ou souhaitez-vous surtout être perçu comme tel ? Une fois que vous aurez répondu à cette question, le choix sera (un peu) plus facile…
Données techniques Aprilia 457 RS
| MOTEUR | |
| Type | bicylindre vertical, DACT, à refroidissement liquide |
| Cylindrée | 457cc |
| Alésage x course | 69 x 61,1 mm |
| Soupapes/cylindre | 4 |
| Taux de compression | 10,5:1 |
| Alimentation | injection électronique |
| Embrayage | multidisque en bain d’huile, à glissement assisté |
| Boîte de vitesses | 6 rapports |
| Transmission finale | chaîne |
| PRESTATIONS | |
| Puissance maximum | 47,6 ch à 9.400 tr/min |
| Couple maximum | 43,5 Nm à 6.700 tr/min |
| ÉLECTRONIQUE | |
| Moteur | cartographie moteur (AEM), 3 modes de conduite, écran TFT |
| Partie-cycle | ABS à deux canaux (+ 2 mode), contrôle de traction, quickshifter |
| PARTIE-CYCLE | |
| Cadre | périmétrique en aluminium |
| Suspension avant | fourche inversée de 41mm |
| Options de réglage | précharge |
| Suspension arrière | mono-amortisseur |
| Options de réglage | précharge |
| Débattement av/ar | 120/130 mm |
| Frein avant | un disque de 320 mm, étrier radial (ByBre)à 4 pistons |
| Frein arrière | un disque de 220 mm, étrier simple piston |
| Pneumatique av/ar | 110/70-17,150/60-17 |
| DIMENSIONS & POIDS | |
| Empattement | 1.350 mm |
| Angle de chasse | n.c. |
| Chasse | n.c. |
| Hauteur de selle | 800 mm |
| Poids TPF | 175 kg |
| Réservoir | 13 litres |
| PRIX | |
| À partir de | 7.199 euros |
Données techniques CFMoto 450SR TC
| MOTEUR | |
| Type | bicylindre vertical, DACT, à refroidissement liquide |
| Cylindrée | 450cc |
| Alésage x course | 72 x 55,2 mm |
| Soupapes/cylindre | 4 |
| Taux de compression | 11,1:1 |
| Alimentation | injection électronique |
| Embrayage | multidisque en bain d’huile, à glissement assisté |
| Boîte de vitesses | 6 rapports |
| Transmission finale | chaîne |
| PRESTATIONS | |
| Puissance maximum | 46 ch à 8.500 tr/min |
| Couple maximum | 39 Nm à 7.600 tr/min |
| ÉLECTRONIQUE | |
| Moteur | / |
| Partie-cycle | ABS Bosch, contrôle de traction, écran TFT connecté, IMU |
| PARTIE-CYCLE | |
| Cadre | tubulaire en acier |
| Suspension avant | fourche inversée de 37 mm |
| Options de réglage | / |
| Suspension arrière | mono-amortisseur |
| Options de réglage | précharge |
| Débattement av/ar | n.c. |
| Frein avant | un disque (Brembo) de 320 mm, étrier radial à 4 pistons |
| Frein arrière | un disque de 240 mm, étrier simple piston |
| Pneumatique av/ar | 110/70 R17,150/60 R17 |
| DIMENSIONS & POIDS | |
| Empattement | 1.370 mm |
| Angle de chasse | n.c. |
| Chasse | n.c. |
| Hauteur de selle | 795 mm |
| Poids TPF | 170 kg |
| Réservoir | 14 litres |
| PRIX | |
| À partir de | 6.699 euros |
