Essai Honda CBR650R et CB650R E-Clutch : Ça fonctionne du tonnerre
Depuis le début de son existence, la marque japonaise a toujours innové. Son créateur, Soichiro Honda, qui était l’exemple même de l’autodidacte, a insufflé tout au long de sa vie, la force d’explorer de nouveaux concepts, à son entreprise. Et aujourd’hui encore, la firme à l’aigle continue sur cette voie avec l’introduction de la technologie E-Clutch.
Et pour ce faire, Honda a choisi la plateforme 650 et son quatre-cylindres en ligne. Les CB650R et CBR650R sont donc les premiers modèles Honda à être équipés de la technologie d’embrayage électronique E-Clutch. Et ce n’est, sans doute, pas un hasard si le premier constructeur mondial a choisi ces modèles de milieu de gamme 4-cylindres. Car Honda est depuis toujours associé à ce type d’architecture moteur, la mythique CB 750 n’est jamais bien loin. De plus, avec ces deux 650 qui font de bons scores de vente (plus de 60.000 exemplaires écoulés depuis leur lancement en 2019) aussi bien les amateurs de roadster que les aficionados de moto sportive seront les premiers à découvrir cette nouvelle technologie.
De quoi parle-t-on ?
Mais au fait, de quoi parle-t-on exactement. Le Honda E-Clutch a été dévoilé au dernier salon de Milan. C’est un système qui s’inspire à la fois du fonctionnement d’un embrayage « classique », d’un quickshifter et du DCT à double embrayage cher à la marque. Pour faire court, ce système supprime l’action sur le levier d’embrayage, un peu comme un quickshifter up/down, en utilisant uniquement le sélecteur. Vous vous demanderez alors, et à juste titre, pourquoi ne pas garder simplement ce qui existe déjà ? La réponse est simple, l’E-Clutch supprime aussi la nécessité d’utiliser le levier d’embrayage au démarrage ou lorsque on s’arrête. Et là, ça devient beaucoup plus intéressant.
Compacte
Pour vérifier le bien-fondé de cette nouvelle technologie, rien de mieux qu’un test grandeur nature. Me voici donc dans la périphérie de Marseille, pour découvrir les nouvelles CB650R et CBR650R E-Clutch. Il faut préciser qu’à partir du modèle 2024, les deux motos ne seront plus disponibles – du moins au Benelux – qu’avec l’embrayage électronique susmentionné. En découvrant les deux motos, rien ne semble les différencier de motos conventionnelles. Les plus avertis remarqueront néanmoins une légère protubérance sur le carter d’embrayage. Le système est compact et ne pèse que 2 kilos.
Lifting
Concernant la CB650R, ce millésime 2024 reçoit un léger lifting avec une nouvelle optique avant, un arrière plus effilé, des ouïes de radiateur modifiées, impliquant également les conduits de la boîte à air ainsi qu’une nouvelle selle. Comme pour la NX500 que nous venons de tester (l’article paraîtra prochainement), la CB650R utilise un écran TFT 5 pouces qui ressemble fort à celui équipant l’XL750 Transalp. Connecté, il fonctionne également via l’application Honda RoadSync. Et naturellement, cet écran est associé à un nouveau commodo gauche, rétroéclairé qui utilise une commande à 4 axes bien foutue. Pour la CBR650R, c’est exactement la même recette. L’esthétique est mise à jour avec un nouveau carénage incluant une optique plus actuelle comme la nouvelle coque arrière identique à sa sœurette. L’écran TFT 5 pouces associé au commodo gauche est bien entendu présent.
Quelques retouches techniques
Pour le reste, moteur et partie-cycle des deux CB restent pratiquement inchangés par rapport aux précédentes versions. On notera néanmoins un nouveau calage des soupapes d’admission du moteur – pour de meilleurs sensations de couple à bas régime. La CBR650R bénéficie également de nouveaux conduits plus lisses dirigeant l’air vers le boîtier de filtre à air (5% de puissance en plus à la roue AR à haute vitesse). Concernant le châssis, les poignées passager sont supprimées et les suspensions reçoivent un nouveau calibrage avec des ressorts plus souples et une compression augmentée.
Le programme
Après ce petit descriptif, il ne me reste plus qu’à tester ces nouvelles Honda. Je débute avec la version sportive CBR650R. Dans un style s’inspirant de la Fireblade elle en jette, surtout en rouge. Il existe également une version noire beaucoup plus sobre. Un des ingénieurs japonais présents m’explique en détails comment gérer l’utilisation de l’E-Clutch avant que nous démarrions. Au programme, une boucle de 130 kilomètres dans l’arrière-pays marseillais, composé principalement de collines. Nous passerons par Gémenos après avoir abordé le massif de la Sainte-Baume en gravissant le Col de la Roussargue, pour ensuite rejoindre la Méditerranée à Cassis, avant de passer par le Col de la Gineste, dans le Parc National des Calanques, et rejoindre notre hôtel. Beau programme en perspective. Mais avant, il nous faut quitter le bord de mer en traversant l’agglomération de la cité phocéenne.
Premiers tours de roue
Tout cela pour vous expliquer, dans quel contexte nous débutons nos premiers tours de roues avec l’E-Clutch. Première chose à savoir : il n’y a aucune commande spécifique pour l’activation ou non du système. Lorsque vous mettez le contact, l’E-Clutch s’active automatiquement, et un témoin lumineux vert placé sur la droite de l’écran TFT, vous confirme que le système a pris le relais. Je remarque immédiatement que le levier d’embrayage « ballotte » comme si le câble de commande était détendu. Pour ce début de test, j’ai pris la décision de faire totalement abstraction de l’embrayage, pour me focaliser uniquement sur le fonctionnement de l’E-Clutch. Avec autorité, j’appuie sur le sélecteur afin d’enclencher le premier rapport et je tourne gentiment la poignée d’accélérateur. Comme par miracle, la moto démarre en douceur et je ressent vraiment bien l’embrayage qui fonctionne sans mon aide.
À quoi sert l’E-Clutch ?
Petit arrêt au feux rouge qui borde l’hôtel, toujours en première. De la même façon qu’avec le DCT – pour ceux qui connaissent – je ne m’occupe de rien, à part freiner et couper les gaz. Je redémarre de la même façon et passe quelques rapports comme avec un quickshifter, normal, la moto en est équipée. Et vous me demanderez alors à quoi sert l’E-Clutch ? Vous avez déjà une première partie de réponse avec ce que je viens de décrire juste avant. Rappelez-vous qu’avec une moto standard équipée d’un quickshifter, il est impossible de démarrer sans actionner le levier d’embrayage. Avec l’E-Clutch, c’est possible. La seconde partie de réponse est qu’au moment où le quickshifter agit sur l’injection et l’allumage – en montant ou descendant les rapports de la boîte de vitesse – l’E-Clutch débraye et embraye automatiquement. Vous avez saisi la différence ?
Mieux qu’un quickshifter
En clair, vous vous contentez d’actionner le sélecteur sans toucher au levier d’embrayage, et la moto fait le reste. Avec l’E-Clutch, les changements de rapport sont plus rapides et surtout plus doux. Je le constate immédiatement, en évoluant dès le début de cet essai, en agglomération . Et c’est surtout la douceur de fonctionnement qui retient toute mon attention. Rien à voir avec une moto équipée simplement d’un quickshifter, la différence est flagrante. Ce qui me frappe également, c’est la facilité avec laquelle je trouve le point mort. Je n’ai jamais connu cela avec une autre moto.
Petit rappel
Sur l’écran TFT, le témoin de rapport engagé est tout ce qu’il-y-a de plus classique. Par contre si vous ralentissez et que le système de gestion électronique estime qu’il est temps de rétrograder, il vous le signalera via ce témoin qui changera de couleur en clignotant et sur lequel apparaitra de petites flèches dirigées vers le bas. Et si vous ne le faite pas, la moto ne réagira pas de la même façon qu’une machine conventionnelle, en « hoquetant », avec le risque de caller. L’embrayage se contentera de « cirer » un peu pour rattraper la situation. Cela parlera certainement à ceux qui ont déjà roulé sur une petite cylindrée équipée d’un moteur 2-temps.
Le plaisir d’un quatre-cylindres
Ce faisant, nous arrivons au pieds des collines où la route devient plus sinueuse. Totalement concentré sur cette nouvelle technologie d’embrayage électronique, j’en oublie presque que je roule sur une moto équipée d’un 4-cylindres de moyenne cylindrée. À cette époque où les motos de cette catégorie sont pratiquement toutes équipées d’un twin vertical, redécouvrir les sensations et le plaisir de conduire un quatre pattes est presque une révélation pour moi. La CBR650R serait plus à son avantage si notre parcours était un peu moins tortueux. Les grandes courbes avalées à bonne vitesse sont plutôt la tasse de saké de cette moto sportive. Mais elle fait le job correctement, offrant une position de conduite pas trop exclusive. On est en appui sur les poignets mais pas trop.
Et la présence de l’E-Clutch permet « d’économiser » la main gauche, c’est toujours ça de gagné. De plus, le moteur est vraiment souple avec une plage d’utilisation assez large. Il n’y a qu’au moment de ralentir, que le manque de frein moteur – par rapport à un twin – se fait sentir. Heureusement, on peut aussi compter sur le système de freinage Nissin progressif et mordant lorsqu’il le faut.
Avec ou sans
La matinée se termine sur un très bon rythme et nous arrivons à Gémenos pour le déjeuner, comme ils disent ici. C’est au moment de repartir que se fait l’échange de moto. J’hérite d’une version grise de la CB650R. Les trois autres coloris proposés (rouge candy, noir mat et vert mat métallisé) sont également présents. La plupart des journalistes présents plébiscitent le coloris vert mat métallisé, comme moi. Le mistral souffle pas mal durant cette journée ensoleillée et je ressent maintenant l’absence de protection. Même avec sa bulle pas très haute, la CBR650R protège mieux. Par contre, avec son grand guidon, la CB650R est plus à son aise sur les chemins sinueux que nous empruntons.
Pour cette seconde partie d’essai, je décide maintenant d’alterner la conduite avec et sans l’E-Clutch. Car oui Messieurs, on peut à tout moment reprendre la main, enfin le levier d’embrayage. Comme durant la conduite d’une moto avec quickshifter. Vous verrez à ce moment que le témoin vert du système E-Clutch ne reste plus allumé. Mais sans intervention sur le levier d’embrayage au bout de 5 secondes à bas régime ou 1 seconde à haut régime, l’E-Clutch est de nouveau actif. (avec le témoin qui réapparait).
Au gré de mon humeur
Je m’amuse à passer d’un mode de conduite à l’autre – avec ou sans l’E-Clutch – au gré de mon humeur, sans qu’à aucun moment le système ne soit pris en défaut. La CB650R vive et légère, s’accommode parfaitement de ce scénario. Le 4-cylindres monte joyeusement dans les tours, pour mon plus grand plaisir. Et je ne vous cache pas qu’entres journalistes, nous nous amusons comme des petits fous. Finalement, nous nous retrouvons dans le parking de l’hôtel, avec l’impression que la journée est passée trop vite. L’écran TFT affiche 138 km au trip partiel avec une consommation moyenne de 5 litres aux cent kilomètres. Ce résultat correspond pratiquement à la moyenne de 4,9 litres (mode WMTC) annoncée par le constructeur. C’est pas mal, compte tenu du rythme que nous avons adopté durant tout la journée, sans beaucoup ménager nos montures.
Conclusion
Avec cette nouvelle technologie, Honda, comme à son habitude, innove là ou d’autres se contentent d’utiliser la même technique depuis longtemps. Le constructeur japonais a toujours centré ses produits sur l’utilisateur, et ce n’est pas le système E-Clutch qui le contredira. Chacun y trouvera son compte, du débutant (la moto est éligible au permis A2) cherchant la facilité au motard plus expérimenté ciblant l’efficacité et les performances. L’E-Clutch est facile à utiliser, il est également rapide et flexible tout en réduisant la fatigue de son utilisateur. Signalons encore, que le système peut être complètement neutralisé via le menu. Le témoin vert de l’écran TFT restera éteint tandis que la lettre M apparaîtra sous l’indicateur de rapport engagé. Honda Benelux a fait le choix d’importer les nouvelles CB650R et CBR650R uniquement en version E-Clutch, là ou d’autres pays propose les deux alternatives, avec ou sans. Question budget, rien à redire. La CB650R 2024 est affichée à 9.599 € contre 9.249 € pour le millésime 2023. Pour la CBR650R, compter sur 10.399 € pour la 2024 et 9.999 € pour la 2023. Vous n’avez plus qu’à choisir entre la sportive et le roadster à la sauce Neo Sports Café.
Photos : Zep Gori et Ciro Meggiolaro
Les + | Les – |
Technologie E-Clutch aboutie | Deux kilos en + (moins manger) |
Efficacité, flexibilité, diminue la fatigue | Convaincre les réfractaires |
Budget préservé |
Fiche technique Honda CB650R (CBR650R)
MOTEUR
Type: 4 cylindres en ligne, 4T, 16 soupapes, DACT, refroidissement liquide
Cylindrée: 649cc
Alésage x course: 67 x 46 mm
Taux de compression: 11.6:1
Embrayage: multidisque en bain d’huile et anti-dribbling
Boîte de vitesse: à 6 rapports
Transmission finale: par chaîne
PRESTATIONS
Puissance maximum: 95,2 ch (70 kW) @ 12.000 tr/min (version 35 kW disponible)
Couple maximum: 63 Nm @ 9.500 tr/min, 49 Nm (35 kW)
ELECTRONIQUE
Moteur: E-Clutch, écran TFT couleur, connectivité
Partie-cycle: contrôle de traction, ABS
CHÂSSIS
Cadre: Type “Diamant” en acier
Suspension avant: fourche inversée SHOWA SF-BPS de 41 mm
Réglage: /
Suspension arrière: amortisseur SHOWA
Réglage: réglable en précontrainte sur 10 positions
Débattement av/ar: nc
Frein avant: deux disques flottant de 310mm, étriers 4 pistons à fixation radiale
Frein arrière: un disque de 240mm, étrier simple piston
Pneumatique av/ar: 120/70-R17, 180/55-R17 Dunlop Sportmax Roadsport 2
DIMENSIONS
Empattement: 1 450 mm
Angle de chasse: 25,5 °
Chasse: 100 mm
Hauteur de selle: 810 mm
Réservoir: 15,4 l
Poids TPF: 207 kg (211 kg)
PRIX
à partir de 9.599 € (10.399 €)
Comment ça marche ?
Un peu de technique pour ceux que cela intéresse. La technologie d’embrayage électronique E-Clutch est principalement composée d’électronique avec une unité de contrôle MCU (associée à des capteurs), de moteurs électriques et d’engrenages.
L’embrayage est actionné par une unité de contrôle MCU (Motor control Unit) qui commande deux petits moteurs électriques.
Cette unité exploite les données provenant :
- Du capteur de vitesse du contre-arbre
- Du capteur d’angle de rotation qui ‘lit’ le taux d’ouverture des disques d’embrayage
- De la centrale électronique ECU
La centrale électronique ECU reçoit les informations suivantes :
- Force d’appui sur le sélecteur
- Rapport engagé
- Position des papillons de gaz
- Régime moteur
- Vitesse des roues
Une boucle de rotation est créée entre le capteur d’angle de rotation et les informations de l’ECU. Basé sur toutes ces données, le MCU contrôle les mouvements de l’embrayage (lorsque le système EClutch est actif). Les contrôles des moteurs ultra fins sont dérivés du programme de robotique Honda