Essai nouveauté Ducati Multistrada V2 S 2025 : Agréablement surpris
Les routes sinueuses autour de Valence sont le cadre de ce premier essai de la nouvelle Ducati Multistrada V2 S. Un essai très spécial, car cette nouvelle machine est propulsée par le tout nouveau bicylindre en V que Ducati a développé pour le segment de milieu de gamme. Êtes-vous aussi curieux que moi de voir le résultat ?
Texte : German Ooms
Révolution
Ce nouveau bicylindre en V peut être considéré comme une révolution dans l’histoire récente des moteurs Ducati. Cette histoire a commencé avec la Pantah, le premier modèle équipé d’un bicylindre en V à 90°, d’un contrôle desmodromique des soupapes et d’un entraînement des arbres à cames par courroie (au lieu d’un arbre). Ce premier V-twin de la Pantah a été suivi par le Desmodue, le Desmoquatro, le Testastretta et enfin le Superquadro. Le nouveau moteur n’a pas encore reçu de nom retentissant et ce n’est pas un hasard. Après tout, le projet maison sur lequel Ducati a travaillé pendant pas moins de quatre ans est très différent de ses illustres prédécesseurs.
Le nouveau V2
Ducati l’appelle « le nouveau V2 » , il a un angle de 90° mais pas de rappel desmodromique des soupapes, et une chaîne de distribution à la place des courroies crantées. Pour les puristes, c’est un sacrilège, pour Ducati, c’est de la pure logique. Le nouveau moteur devait être plus léger, plus compact et plus facile à entretenir. Les performances extrêmes ne font pas partie du cahier des charges et la commande des soupapes desmodromiques n’a pas beaucoup de sens. En outre, un moteur desmo est coûteux à construire et à entretenir. C’est pourquoi, comme pour le V4 gran turismo, le choix s’est porté sur un fonctionnement conventionnel des soupapes avec poussoirs et ressorts. Ce choix s’accompagne d’un calendrier d’entretien avantageux. Le réglage des soupapes n’est nécessaire qu’après 30 000 km, et l’entretien régulier tous les 15 000 km. C’est identique au modèle précédent, mais le réglage des soupapes est beaucoup plus simple et donc moins coûteux.
Plus léger
Le deuxième avantage du nouveau moteur, qu’il ne faut pas sous-estimer, est qu’il est considérablement plus compact et plus léger. On s’en aperçoit dès que l’on passe quelques instants sur la selle de la nouvelle Multistrada. La moto est nettement plus étroite au niveau du moteur, ce qui, associé à la nouvelle selle, garantit que vos pieds touchent facilement le sol. La hauteur de la selle est d’ailleurs réglable rapidement et sans outil de 830 mm à 850 mm. Si vous optez pour la V2 S testée ici avec ses suspensions à commande électronique, le nouveau système de précharge minimale permet même d’obtenir une hauteur de selle de seulement 790 mm si nécessaire. Dans la pratique, ce dernier s’avère être plus un gadget aux résultats limités.
Bruit sismique
Le moment magique arrive : une brève pression sur le bouton nous permet d’entendre pour la première fois la voix du nouveau V2. Le fait qu’il ne s’agit pas d’un « vieux » bicylindre en L est immédiatement perceptible. Les bruits mécaniques sont nettement moins nombreux et la pureté avec laquelle le moteur tourne n’a rien à voir avec le bruit sismique que l’on peut attendre d’une Ducati démarrée à froid. Les yeux bandés, on reconnaîtrait à peine ce moteur comme étant celui d’une Ducati. Heureusement, le son de l’échappement lui-même est typique de Ducati. La pureté avec laquelle le moteur répond à la poignée d’accélérateur est de bon augure.
Nouvelle interface
Avant de commencer, je parcours les menus du nouveau tableau de bord TFT de 5 pouces. L’interface de contrôle est nouvelle, mais selon la tradition Ducati, elle est extrêmement pratique à utiliser. En un rien de temps, vous découvrez les cinq modes de conduite disponibles (Sport, Touring, Urban, Enduro, Wet), le réglage des suspensions à contrôle électronique et des éléments tels que le contrôle de traction, de wheeling, de frein moteur, le régulateur de vitesse et une foule d’autres systèmes d’aide à la conduite conçus pour rendre la vie à bord de cette nouvelle Multistrade V2 S plus agréable et/ou plus sûre. Si vous souhaitez plonger plus profondément dans les menus sous-jacents, il vous faudra un peu de pratique. Mais une fois que l’on a compris comment cela fonctionne, tout se passe en douceur.
Premières impressions
Le nouveau moteur possède un embrayage en bain d’huile. Il n’y a donc plus de claquement caractéristique des disques d’un embrayage à sec sur cette Duc non plus. Son fonctionnement n’est pas très doux, mais le moment d’engagement est net. C’est parti. Devant la roue de 19 pouces s’étalent 200 km pour apprendre à connaître cette nouvelle machine. Les conditions météorologiques sont parfaites et je suis impatient d’en découdre. La Multistrada l’est manifestement aussi. Les premières impressions sur le nouveau moteur sont tout à fait positives. La facilité avec laquelle je me faufile dans le trafic, la réponse très nette à la poignée d’accélérateur et la souplesse impressionnent.
Moins d’efforts
Dans la circulation urbaine dense, la nouvelle Multistrada est plus facile à conduire que la version sortante, cela se voit immédiatement. Grâce à la souplesse du moteur, aux deux premiers rapports plus courts, ainsi qu’au poids inférieur de 23 kg de la machine. Tout se passe plus facilement et demande moins d’efforts. Vous vous sentez également à l’aise sur la moto. La selle nouvellement conçue est dure mais agréable, et le triangle selle-repose-pieds-direction assure une position de conduite agréable et détendue. La machine semble aussi nettement plus compacte et les nouveaux longerons latéraux permettent un meilleur contact avec la moto. Vous êtes également un peu moins « à l’intérieur » de la machine, ce qui vous donne une position de conduite plus dominante.
Un monde de différence
Alors que nous laissons derrière nous la circulation urbaine intense de Valence, le rythme et le facteur de plaisir augmentent considérablement. Une fois de plus, je suis agréablement surpris par ce nouveau V-twin. Les 115 chevaux sont très volontaires. Mais c’est surtout la puissance toujours disponible qui impressionne. Le moteur est doté d’une distribution variable des soupapes d’admission, ce qui fait toute la différence. Dès 3 500 tr/min, vous disposez de 70 % du couple maximum (92,1 Nm à 8 250 tr/min), et le moteur répond instantanément. La précédente version devait tourner à au moins 4 000 tr/min pour fonctionner quelque peu en douceur. La nouvelle fait beaucoup mieux, même lorsque vous ouvrez les gaz à 3 500 tr/min sur le sixième rapport. Joli !
Apparences trompeuses
L’étagement de la boîte de vitesses à six rapports s’accorde parfaitement avec le caractère du nouveau bicylindre en V et propulse la Multistrada vers l’avant, sans à-coups et avec une accélération assez vive. Tout est si doux qu’au fur et à mesure que je parcoure des kilomètres, je tombe de plus en plus amoureux de ce nouveau moteur. Tout est tellement équilibré que j’ai l’impression que ce moteur va continuer à tourner pendant un million de kilomètres. Le calage variable des soupapes d’admission et le volant d’inertie plus lourd ne manquent pas leur effet et entrainent des moyens régimes excitants même si les accélérations semblent platoniques. Mais les apparences peuvent être trompeuses. Les 115 chevaux sont bien là. C’est surtout en passant du mode Touring au mode Sport que la Multistrada passe à la vitesse supérieure.
Fermeté
Lorsque je modifie les réglages des suspensions semi-actives Skyhook, la Multistrada change clairement de caractère. La réponse à la poignée d’accélérateur est plus vive et la Ducati montre clairement qu’elle est apparentée aux autres canons de Bologne. La Multistrada est prête pour le jeu que j’aime : foncer d’un virage à l’autre, freiner le plus tard possible et sentir ce dont cette nouvelle venue est capable. Et d’en profiter en même temps. Petite critique à l’égard du quickshifter. Il exige de la fermeté. Une manipulation trop douce du sélecteur entraîne parfois une réponse peu claire de l’électronique.
Équilibre réussi
Il apparaît rapidement que le tout nouveau châssis est tout sauf un rabat-joie. Le nouveau V-twin joue un rôle de premier plan, non seulement en tant que fournisseur d’énergie, mais aussi en tant qu’élément de soutien du cadre. Du moins, dans la mesure où l’on peut parler de cadre. À l’avant, une construction en aluminium moulé assure la liaison entre la fourche et le moteur, tandis qu’à l’arrière, une construction en treillis boulonnée et fixée sur le moulin sert de cadre arrière. Le bras oscillant s’articule également sur les carters du moteur. Ainsi, trois pièces distinctes forment, avec le V2, la base du châssis. Assisté par une fourche Marzocchi de 45 mm à commande électronique et un amortisseur arrière de la même marque équipé d’un ressort à enroulement progressif, ce châssis offre un équilibre particulièrement réussi entre confort et contrôle.
Contrôle total
Avec son poids considérablement réduit (même les roues ont été allégées de 3 kg), la nouvelle Multistrada se conduit beaucoup plus rapidement et avec plus de précision. La machine est joueuse mais pas nerveuse, elle est agile et stable. Le guidon large et la position de conduite droite donnent une merveilleuse sensation de contrôle total. Le système Skyhook des suspensions (développé par ZF) contrôle l’ensemble avec une extrême finesse et évite les plongeons du train avant lors des freinages brusques. Et ce, malgré un débattement de 170 mm. Les étriers avant Brembo M4.32 ne déçoivent pas non plus sur cette moto. Le freinage est puissant et parfaitement contrôlable.
Une forme de bec sophistiquée
La protection contre le vent a fait l’objet d’un travail acharné. Le pare-brise peut être réglé de manière pratique et avec la forme astucieuse du « bec » vous êtes remarquablement bien à l’abri du vent. Le régulateur de vitesse de série fait également son travail correctement. Il n’est pas adaptatif comme sur la Multistrada V4, mais il reste très pratique. Sur la V2 S que je conduis, le système multimédia Ducati est également de série. Une option bien pratique est le système de navigation virage par virage qui indique le chemin à suivre via le tableau de bord clairement lisible avec des symboles simples. Si vous souhaitez utiliser un GPS séparé ou d’autres accessoires, la connexion USB du tableau de bord est très pratique. Il manque toutefois un petit compartiment de rangement. De plus, les poignées chauffantes sont en option.
Gimmick
Le tableau de bord lui-même se présente sous trois aspects différents : Road, Road Pro et Rally. L’astuce de la version Road Pro est l’affichage en temps réel de la puissance et du couple utilisés. Après cet essai, le tableau de bord affichait une consommation moyenne de 5,9 l/100 km. Compte tenu de notre rythme de conduite, c’est plus que correct. Le réservoir de 19 litres permet donc de parcourir plus de 300 km, ce qui est suffisant même pour les grands voyageurs. L’arrière étroit de la Multistrada comporte non seulement de solides poignées pour le passager, mais aussi des supports « flottant » pour les valises. Ducati les propose en plastique (60 litres) ou en aluminium (76 litres).
Décision
Je l’avoue, j’étais un peu sceptique quant au nouveau moteur de cette Multistrada. Je craignais qu’il noie les nouvelles Ducati dans la masse, des Ducati moins vraies que les autres en quelque sorte. Ces craintes se sont avérées totalement infondées. Quoi qu’il en soit, ce V-twin est fantastiquement performant sur cette nouvelle Multistrada, offrant des performances nettement supérieures à celles du modèle précédent. D’accord, le cylindre avant n’est plus joliment horizontal, il n’y a plus de fonctionnement desmodromique des soupapes et le son est plus « civilisé ». Mais ces éléments m’ont-ils perturbé durant cet essai ? Non, pas une seconde. Et ce, grâce aux qualités de la moto dans son ensemble. La nouvelle Multistrada V2 S roule mieux, se manie mieux et peut tout simplement faire plus que le modèle sortant. De plus, les coûts d’utilisation seront moindres. La V2 S présentée ici avec les suspensions à contrôle électronique coûte 19 190 €. Pour la superbe version verte, il faut débourser 400 euros de plus. La Multistrada V2 standard coûte 16.490 euros. Dans un peu moins de deux semaines, je roulerai sur la nouvelle Panigale V2 S équipée du même moteur. Êtes-vous aussi curieux que moi du résultat ?
Photos: Ducati
Les plus et les moins
Les + : Moteur fantastique, position de conduite, qualité de la direction
Les – : Pas de compartiments de rangement, ll faut s’habituer au quickshifter, poignées chauffantes en option
Données techniques |
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MOTEUR | |
Type | bicylindre en V à 90°, refroidissement liquide |
Cylindrée | 890cc |
Alésage x course | 96 x 61,5 mm |
Soupapes/cylindre | 4 |
Taux de compression | 13,1:1 |
Alimentation | 2 injecteurs par cylindre, ride-by-wire |
Embrayage | multidisque en bain d’huile à glissement |
Boîte de vitesse | à 6 rapports |
Transmission finale | chaîne |
PRESTATIONS | |
Puissance maximum | 115,6 ch (85 kW) @ 10.750 tr/min |
Couple maximum | 92,1 Nm @ 8.250 tr/min |
ÉLECTRONIQUE | |
Moteur | Ride-by-wire, Ducati Wheeling Control, contrôle du frein moteur, Ducati Quick Shifter (DQS2.0) |
Partie-cycle | ABS en virage, Ducati Skyhook Suspension |
PARTIE-CYCLE | |
Cadre | monocoque en aluminium |
Suspension avant | fourche inversée de 45 mm Marzocchi, Ducati Skyhook DSS |
Possibilités de réglage | Entièrement réglable électroniquement |
Suspension arrière | monoamortisseur Marzocchi, Ducati Skyhook DSS |
Possibilités de réglage | Entièrement réglable électroniquement |
Débattement av/ar | 170 mm / 170 mm |
Frein avant | deux disques semi-flottants de 320mm, étriers monobloc Brembo à 4 pistons |
Frein arrière | un disque de 265mm, étrier flottant Brembo à 2 pistons |
Pneumatique av/ar | Pirelli Scorpion Trail 2 120/70-ZR17, 170/60-ZR17 |
DIMENSIONS & POIDS | |
Empattement | 1.572,5 mm |
Angle de chasse | 24,3° |
Chasse | 105,5 mm |
Hauteur de selle | 830-850 mm |
Poids TPF | 202 kg |
Réservoir | 19 litres |
Prix | à partir de 19.190 euros (V2 standard : 16.490 euros) |