Essai nouveauté, Harley-Davidson Pan America 1250 ST : L’aventure sur la route ?
Lorsque Harley-Davidson a annoncé l’arrivée de la Pan America il y a quelques années, le monde de la moto est presque tombé à la renverse. Que venais faire le spécialiste des gros V-Twins chromés dans le monde du tout-terrain ? Relativement peu de choses, même si le trail américain a rencontré un certain succès en concession. Mais voilà, cinq ans exactement après ses débuts, ce modèle fait une remarquable marche arrière. Un retour des routes de montagne poussiéreuses vers l’asphalte, où des concurrentes de haut niveau comme la Yamaha Tracer 9 font la loi. La Pan Am tiendra-t-elle son rang sur l’asphalte, ou la reverrons-nous bientôt rester définitivement entre les bois et les ruisseaux ?
Texte : Jelle Verstaen
Photos: Manu De Soomer / Motorsportspics.com
Le tour du propriétaire
Le fait que cette nouvelle venue soit plus orienté vers l’asphalte que vers la terre est déjà évident lors du tour du propriétaire. En effet, on remarque immédiatement qu’il n’y a plus de jantes à rayons ni de pneus sculptés comme sur la version Special. Et la combinaison 19/17 pouces à disparue au profit d’une paire de jantes en aluminium coulées de 17 pouces chaussées avec des Michelin Scorcher Sport. La hauteur de selle diminue de 25 mm avec un débattement inférieur des suspensions (170 mm à l’avant et à l’arrière, contre 190 sur la Pan Am de base) comme la garde au sol qui passe de 210 à 170 mm. La selle est également légèrement creusée, ce qui signifie que la moto est vraiment accessible aux pilotes de petite taille.
Plus ou moins ?
Fait remarquable – surtout pour une « Adventure Tourer » comme cette ST – le pare-brise d’origine réglable cède la place à un pare-brise fixe, plus petit et fumé. Les protège-mains, la béquille centrale et l’amortisseur de direction passent à la trappe et les repose-pieds rétrécissent également de manière sensible. Ceux qui s’aventureront sous la moto remarqueront également que la ligne d’échappement a été considérablement affinée. Elle se passe désormais d’une chambre intermédiaire et donnera un peu plus de clairon. Le fait que les bruits de roulement soit également beaucoup plus faible sans les pneus à crampons ne fait que renforcer la nouvelle audition de l’échappement. Génial ! Il est par contre surprenant qu’avec la disparition de certains accessoires, la ST pèse encore un kilos de plus que la version standard avec 246 kilos en ordre de marche. Une différence qui s’explique vraisemblablement par des jantes plus lourdes !
Beaucoup plus actif
Dès que l’on monte sur la ST, on remarque logiquement que la position de conduite est bien plus accessible que sur Pan America standard, surtout pour les motards mesurant entre 1m70 et 1m75 – comme votre serviteur. La selle concave plus profonde rend également l’assise légèrement plus compacte – lisez : angle des genoux plus serré – ce qui donne immédiatement l’impression d’être beaucoup plus actif. Les bras sont tendus le long du réservoir vers le guidon légèrement plus étroit. Par contre, tableau de bord est familier, avec son écran TFT et ses commandes. Les commodos sont identiques aux autres versions de la Pan Am, et la plupart des aides électroniques à la conduite sont conservées. Il s’agit de l’IMU, de l’ABS sensible à l’inclinaison, de l’antipatinage, du contrôle du wheeling, des indicateurs de pression des pneus et de l’antipatinage DSCS. Seuls les gadgets spécifiquement conçus pour le tout-terrain ont été relégués au second plan, parce qu’ils sont totalement inutiles. Pensez à l’ABS arrière commutable et aux modes de conduite tout-terrain. Le quickshifter Screamin’ Eagle (haut/bas) fait cependant partie de l’équipement de série.
Un moteur familier
Sous le réservoir se trouve le même bicylindre en V Revolution Max de 1 252 cm3 que sur les autres Pan America. Dans cette version, il développe 150 ch et 127 Nm, à respectivement 9 000 et 6 750 tr/min. Deux Newton-mètres de plus, donc, et un pic de puissance 250 tr/min plus élevé qu’auparavant. Mais ce qui est le plus impressionnant avec cette machine, c’est la façon dont ces chiffres se traduisent sur l’asphalte. Par exemple, le gros bicylindre en V délivre déjà pas mal de couple à bas régimes, par contre évitez de descendre sous la barre des 2 000 tr/min. Sa plage d’utilisation usuelle se situe entre 3 000 et 5 500 tr/min, mais il vaut mieux se préparer à la barre des 6 000 tr/min. C’est à ce moment-là que le Revolution Max se déchaîne et monte en régime. C’est fou ce que ce moteur peut injecter comme watts.
Légèrement rugueux
Cela dit, il faut appréhender le mode Sport, qui est réglé de manière assez agressive, l’ABS et l’antipatinage intervenant par la suite. Dans ce mode, la ST se transforme en une véritable bête de course. Avec notamment des accélérations impressionnantes dès les plus bas régimes et un surplus de puissance en haut. C’est impressionnant, même si le mode Road reste le plus utilisable des modes préréglages. Petit bémol pour le quickshifter qui fonctionne correctement à bas régime, mais ses performances deviennent limitées ensuite. Le passage des rapports à partir de 5 000-5 500 tr/min s’accompagne invariablement de secousses considérables. Le rétrogradage se fait généralement plus en douceur. Mais il est évident que la mise au point globale semble approximative, dommage.
Plus adapté à la route
La plus grande différence entre la ST et les versions standard et Special concerne, bien sûr, les suspensions et la géométrie. À l’avant, la Harley-Davidson Pan America 1250 ST est équipée d’une fourche inversée Showa de 47 mm, à l’arrière, on trouve un mono-amortisseur entièrement réglable du même fabricant, avec piggyback et une molette séparée fait son apparition pour le réglage de la précharge. En raison de la réduction des débattements de suspension, des composants internes et de la modification de la taille des jantes, l’empattement diminue de 5 mm et la chasse passe de 108 à 95 mm – l’angle de chasse reste par contre inchangé.
Quelques clics nécessaires
L’impact de ces modifications est tout simplement stupéfiant. Les changements de direction sont nettement plus vifs et plus faciles, et les virages sont pris avec plus de précision et de confiance. Tout cela sans tomber dans l’excès avec une direction trop nerveuse – la Pan Am ST reste stable et rayonne de calme à haute vitesse. Malgré son apparence et son approche agréablement agressives, la ST semble d’abord un peu molle sur le train avant, en particulier sur les phases de freinage. Bien que les réglages de base rendent la moto assez confortable, ils ne s’accordent pas très bien avec la débauche de puissance libérée. Heureusement, il est possible de régler l’amortissement en compression et en détente sur la fourche avant. La sensation de souplesse disparaît donc rapidement avec quelques clics de compression supplémentaires.
Un monde de différence
Si les jantes de 17 pouces jouent évidemment un rôle important dans la tenue de route, les pneus qui les équipent font au moins autant la différence. En effet, les pneus Michelin Scorcher Sport (120/70 à l’avant et 180/55 à l’arrière) offrent nettement plus de précision et d’adhérence que les gommes plus sculptées de la Pan America standard. Compliments à l’équipe de développement de Milwaukee : la ST ne donne pas l’impression d’être un modèle qui a simplement été converti avec des jantes passant de 19 à 17 pouces. Au contraire, on a l’impression que cette moto a été conçue dès le départ avec ce châssis plus sportif. Alors que de telles modifications se traduisent souvent par une direction un peu forcée, la moto voulant « tomber » dans les virages, ce n’est pas du tout le cas avec la Pan Am ST. Si vous souhaitez arrêter les 246 kilos de manière contrôlée, vous pouvez compter sur les freins Brembos améliorés et reliés électroniquement de cette ST. À l’avant, les étriers radiaux Monobloc à quatre pistons mordent de manière incisive mais avec finesse sur deux disques flottants de 320 mm; à l’arrière, l’ensemble disque/étrier suffit amplement pour toute manœuvre ou correction. Il n’y a absolument rien à craindre.
À changer
Malgré son tempérament sportif, le confort de conduite est correct. Le moteur lui-même ne transmet pas trop de vibrations pour un bicylindre en V de cette cylindrée, et la selle offre beaucoup d’espace au pilote et est bien rembourrée. Comme nous l’avons mentionné, vous sacrifiez un peu d’espace pour les jambes par rapport à la Pan Am normale, mais pour pallier ce manque, une selle plus haute (+25 mm) est disponible en option pour les pilotes de grande taille. Le point d’interrogation – pour tous les gabarits de conducteur – est la protection contre le vent : le pare-brise de petite taille et non réglable crée plus de turbulences que vous ne le souhaiteriez sur une tourer, en particulier à des vitesses plus élevées et certainement sur autoroute. Des solutions sont bien sûr disponibles dans le copieux catalogue d’accessoires Harley-Davidson, où vous pourrez dénicher un pare-brise plus haut de 28 cm (11”) ou de 46 cm (18”) pour quelques euros supplémentaires.
Tarif et coloris
En parlant d’euros, la Pan America 1250 ST est disponible à partir de 20 495 € et se décline en trois coloris. Pour le prix de base, vous ne repartirez qu’avec le Gris Billiard, pour le Noir Vif (comme notre moto d’essai) et le Rouge Brillant, il faudra compter 450 € de plus. Dans la gamme, Harley-Davidson positionne sa nouvelle ST entre la Pan America (18.995 €, non renouvelée pour 2025) et la Pan America Special (20.895 €, modèle 2025) en termes de prix. La CVO entièrement équipée (2025) est plus onéreuse avec un prix de départ de 28.995 euros.
Conclusion
Pour répondre à la question posée en introduction : oui, la Harley-Davidson Pan America 1250 ST a sa place parmi ses concurrentes plus orientées street, il n’y a aucun doute à ce sujet après cet essai. Cependant, nous tiquons encore un peu sur deux points. Oui, nous sommes fans de l’allure et de la sonorité plus sportives, de la maniabilité plus importante, des freins puissants et du moteur expressif. Pour nous, c’est une réussite, qui permet aux Américains de compléter leur gamme de manière plus que solide avec cette ST. En revanche, surtout pour une moto de tourisme sportif – car c’est bien de cela qu’il s’agit – je m’attendais à une protection contre le vent beaucoup plus importante, et le quickshifter doit être plus performant pour être considéré comme un véritable atout. Le premier problème peut être facilement résolu avec quelques euros supplémentaires, mais le second est moins facile à solutionner. Il reste à voir si la Pan America 1250 ST sera un succès commercial, seul l’avenir nous le dira.
Les plus | Les moins |
Fonctionnement moteur et sonorité de l’échappement | Disparition du pare-brise réglable |
Direction plus vive que sur la Pan Am standard | Quickshifter pas très souple |
Position de conduite plus accessible |
Données techniques Harley-Davidson Pan America 1250 ST
MOTEUR | |
Type | bicylindre en V Revolution Max, DOHC, distribution variable |
Cylindrée | 1.252 cc |
Alésage x course | 105 x 72,3 mm |
Soupapes/cylindre | 4 |
Taux de compression | 13:1 |
Alimentation | Injection électronique |
Embrayage | multidisque en bain d’huile |
Boîte de vitesse | à 6 rapports, à glissement limité |
Transmission finale | par chaîne |
PRESTATIONS | |
Puissance maximum | 150 ch (112 kW) @ 9.000 tr/min |
Couple maximum | 127 Nm @ 6.750 tr/min |
ÉLECTRONIQUE | |
Moteur | modes de conduite, IMU, quickshifter |
Partie-cycle | ABS et antipatinage sensible en inclinaison, DSCS, démarrage en côte, freinage couplé |
PARTIE-CYCLE | |
Cadre | treillis en acier, moteur porteur |
Suspension avant | fourche inversée Showa de 47 mm |
Options de réglage | précharge et compression |
Suspension arrière | monoshock avec amortisseur Showa |
Options de réglage | précharge |
Débattement av/ar | 170/170 mm |
Frein avant | deux disques flottants de 320 mm, étriers Brembo radiaux à 4 pistons |
Frein arrière | un disque de 280 mm, étrier simple piston |
Pneumatiques av/ar | 120/70ZR17, 180/55ZR17 (Michelin Scorcher Sport) |
DIMENSIONS & POIDS | |
Empattement | 1.570 mm |
Angle de chasse | 25° |
Chasse | 95 mm |
Hauteur de selle | 825 mm |
Poids TPF | 246 kg |
Réservoir | 21,2 litres |
PRIX | |
À partir de | 20.495 € |