Essai Royal Enfield Guerrilla 450 : La guerre urbaine est déclarée
“Faite l’amour, pas la guerre” est à l’origine un slogan antiguerre issu de la contre-culture des années 1960 aux États-Unis. Mais malheureusement, soixante ans après, ce slogan est toujours d’actualité. Mais faisons une parenthèse pour nous intéresser à la nouvelle venue du constructeur indien. La guerrilla 450, qui arrive dans le catalogue Royal Enfield. Ce deuxième rejeton de la famille 450 est là, d’après son diminutif, pour foutre la pagaille en milieu urbain et plus si affinité. Pari réussi ? Pour répondre à cette question, nous sommes allés nous battre dans la jungle urbaine de Barcelone.
Texte : Jelle Verstaen
Plus qu’une Himalayan dépouillée ?
La Guerrilla 450 est donc construite autour du moteur Sherpa 450, que nous avons eu le privilège de découvrir sur la nouvelle Himalayan 450. Il s’agit d’un monocylindre de 452 cm3 refroidi par eau et doté d’un double arbre à cames en tête, qui développe 40 ch et 40 Nm à respectivement 8 000 et 5 500 tr/min. Sur le plan interne, rien n’a changé pour sa transplantation sur la Guerrilla 450 : le moteur est identique, de l’alésage à la course, en passant par l’étagement de la boîte de vitesses à six rapports, la puissance et le couple. Les deux seules différences se situent au niveau de la cartographie des modes de conduite, d’une part, et de la couronne arrière légèrement différente (47 contre 45 dents). Mais les parallèles s’arrêtent là.
Une parfaite adéquation
Après tout, la transformation d’un trail en roadster exige une allure plus sportive et plus trapue : la roue avant passe donc de 21 à 17 pouces, le bras oscillant a été raccourci, l’axe de direction se trouve plus en arrière et l’angle correspondant est beaucoup plus aigu, de sorte que l’empattement augmente de 70 mm par rapport à celui de l’Himalayan. Les repose-pieds sont plus hauts de 25 mm, le guidon beaucoup plus bas et le débattement des suspensions a été raccourci pour une position “street” active. Sur la Guerrilla, il reste 150 mm et 145 mm sur les 200 mm de débattement des suspensions avant et arrière. Le fournisseur de service est Showa. La hauteur de selle a également été considérablement réduite, passant de 825 à 780 mm, avec un œil sur le mot clé du jour : l’accessibilité. Le frein arrière reste inchangé, mais à l’avant, c’est un système plus puissant qui se distingue, même si l’ABS est calibré différemment.
1970s
Alors que les couleurs camouflage de Himalayan se fondent encore parfaitement dans n’importe quel décor envahi par la végétation, la Guerrilla apparaît plus visible afin de se différencier de la masse. Les designers présents ont opté pour un croisement entre les années 1970 et une touche de pop art, pour aboutir à cinq coloris percutants. Enfin, quatre qui attirent l’attention et le subtil (non disponible chez nous) Smoke Silver. Il y a une version noire avec une bande jaune et rouge frappante, un coloris or/rouge plutôt kitsch, une nuance blanc/bleu pomme et un mix mauve/jaune à pois/noir. Bravo pour l’audace de Royal Enfield, mais les couleurs nous semblent être un gros pari. L’inspiration est claire, mais l’élaboration est – à notre humble avis – surtout réservée aux plus extravertis d’entre nous. Il n’y a rien à redire sur la finition, et c’est très bien ainsi !
Accessibilité
Royal Enfield sait ce qu’elle veut : faire monter plus de motards sur ses motos. Qu’il s’agisse d’adeptes de la planche à voile ou de ceux que l’on appelle les “downsizers”, et ce, à plus d’un titre. Après tout, la hauteur de selle est d’à peine 780 mm, de sorte que même sur cette petite moto on repose sur le bitume avec les deux pieds au sol. Le triangle entre les repose-pieds, la selle et le guidon vous pousse légèrement vers l’avant, au-dessus du réservoir. Ce faisant, le large guidon trouve confortablement les mains, avec tous les commodos parfaitement à portée de main, tandis que la selle joliment rembourrée reste toujours confortable. Même après 170 km, je n’ai pas ressenti la moindre gêne dans les jambes, le bas du dos ou les poignets. Outre son prix raisonnable (6 049 euros), la consommation est un autre facteur qui la rend aussi accessible que possible. Avec une consommation déclarée (WMTC) de 3,39 l/100 km, vous pourriez théoriquement rouler plus de 320 kilomètres avec le réservoir de 11 litres – à un rythme plus soutenu, comptez plutôt environ sur 250 kilomètres.
Tableau de bord Tripper
Malgré son prix modeste et son approche “entrée de gamme”, le tableau de bord de la Guerrilla n’a pas de leçon à recevoir de motos beaucoup plus chères. En effet, Royal Enfield a intégré son Tripper Dash – le petit écran numérique qui a déjà fait fureur sur la précédente génération de l’Himalayan – dans le tableau de bord principal des versions dont nous disposons. Le résultat est un écran TFT rond de 4 pouces avec connectivité sur lequel vous pouvez régler votre musique et passer des appels et des messages. Grâce à une collaboration étendue avec Google Maps, vous pouvez également obtenir votre navigation projetée devant vous en un clin d’œil si vous le souhaitez. Petit plus : la coopération entre l’ordinateur de bord et votre système de navigation. Votre témoin de réserve s’allume ou le système détecte un message d’erreur ? Dans ce cas, on vous propose immédiatement un itinéraire alternatif vers la pompe à carburant ou le concessionnaire le plus proche. Petit plus, bis : sous le guidon, du côté gauche, se cache une prise de recharge USB(C). Pratique !
Un atout majeur
L’essai routier nous conduit du port de Barcelone vers les montagnes qui ceinturent la capitale catalane. Mais pas avant d’être passé par le Circuito de Montjuïc – un ancien circuit routier théâtre du GP d’Espagne jusqu’en 1976, et de l’endurance avec les 24H de Montjuïc jusqu’en 1986. Aujourd’hui, il est possible d’y rouler comme un simple mortel, ce qui met immédiatement en évidence l’une des grandes forces de cette Guerrilla. La combinaison du poids relativement faible (184 kg), de la centralisation intelligente des masses, de l’angle prononcé de la direction, de la rigidité du cadre et du calibrage des suspensions avant et arrière permet d’obtenir une moto à la direction merveilleusement fluide.
Limites
La fourche Showa de 43 mm n’a pratiquement pas besoin d’être sollicitée lors des changements de direction et permet même à la Guerrilla d’entrer dans les virages un peu plus vite que prévu, elle excelle également (malgré sa construction apparemment simple) en termes de stabilité. Si vous poussez vraiment le rythme sur les routes de montagne, vous remarquerez que les limites de la moto se manifestent ici et là – mais sans jamais y arriver. Le mono-amortisseur arrière est doté d’un ressort linéaire, contrairement à la version “double taux” de l’Himalayan, qui filtre la plupart des chocs et ne s’affole pas, même à grande vitesse. Suffisamment souple pour épargner votre colonne vertébrale, assez rigide pour supporter un rythme élevé. Nous avons déjà connu pire dans ce segment – bravo !
Facilité d’utilisation
Si les pneumatiques CEAT Gripp XL nous avaient laissés un peu dubitatifs au départ, nous avons été complètement conquis après cet essai. Le profil “mixte” de ces gommes semble plus adapté aux scramblers qu’à un roadster pur-sang, mais il ne faut pas oublier que les routes ne sont pas identiques partout dans le monde. Pour le reste, les pneus CEAT s’accrocheront fermement à l’asphalte – certes bien chauffé – pendant 170 kilomètres et ne perdront jamais leur adhérence, même à des vitesses plus élevées et à des angles d’inclinaison plus importants. Rien à redire. L’étrier à 2 pistons monté axialement mord dans le disque de frein avant de 310 mm avec la sensation nécessaire et une excellente incisivité. Et le frein arrière se distingue également par sa facilité d’utilisation : la combinaison du disque de frein de 270 mm et du piston unique est parfaitement contrôlable pour toutes les manœuvres – à la fois à faible comme à haute vitesse.
Un contraste saisissant
Le moteur Sherpa 450 constitue un autre point positif, bien qu’au départ, il ne s’agisse pas d’un “foudre de guerre”. En effet, la réponse initiale du mono à l’accélération est plutôt destinée aux pilotes débutants, avec une montée en régime très douce en première vitesse et une accélération d’abord prudente en seconde. Cette sensation contraste fortement avec le couple qui se trouve un peu plus haut dans les tours (et les rapports supérieurs) : à partir de 3 000 tr/min, la fête commence, mais la plage de puissance se trouve entre 5 000 et 6 500 tr/min. Les rétroviseurs ne sont vraiment utiles qu’à l’arrêt, car ils vibrent rapidement. Le mono pousse sans frémir jusqu’à 8 000 tr/min. Si l’on tourne vivement la poignée de gaz, le Sherpa remplit ses poumons avec beaucoup de caractère – un son d’admission qui peut charmer.
Avide de régime
Dans la recherche de cette plage d’utilisation relativement étroite pour trouver une bonne puissance, vous finissez souvent par jongler avec l’excellente boîte de vitesses (avec assistance au glissement) à la recherche du bon rapport. Surtout en mode Eco, où la montée en puissance depuis la fermeture des gaz jusqu’à la pleine puissance prend presque deux fois plus de temps – nous resterons en mode “Performance” durant les kilomètres restants. Le monocylindre est très gourmand en régime, sans pour autant aspirer à la zone rouge. Cela est en partie dû à l’architecture “super carré” du bloc, un atout que Royal Enfield possède par rapport à la concurrence. Les 84 x 81,5 mm rendent le moteur moins vif à haut régime – moins de puissance, mais plus de couple à bas et moyens régimes. En ces temps de guerre à la puissance, ne vous attendez pas à des folies de la part de la Guerrilla 450, mais ce qu’elle fait, elle le fait bien. Aussi bien pour les novices que pour les pilotes plus expérimentés.
Conclusion
Il y a un élément que j’aime moins sur la Guerrilla 450 : en première vitesse, il faut attendre un peu longtemps pour que la moto prenne vie. Une montée en régime peut-être trop prudente, que Royal Enfield dit avoir cartographiée pour submerger le moins de pilotes possible et garder la Guerrilla 450 aussi accessible que possible. Mais les réserves s’arrêtent là. En effet, le petit roadster s’est révélé une véritable aubaine tout au long de notre essai. Du châssis bien conçu à l’ergonomie, en passant par le petit moteur, la fonctionnalité des commodos, l’écran TFT et la finition : la Guerrilla 450 est tout simplement une très belle machine, à un prix compétitif. Une machine avec laquelle Royal Enfield poursuit sans relâche sa conquête du marché de la moto et n’a à craindre que la concurrence d’une autre bête de somme provenant de Grande-Bretagne : la Triumph Speed 400. Encore un essai comparatif en perspective !
Données techniques de la Royal Enfield Guerrilla 450
MOTEUR | |
Type | Monocylindre à refroidissement liquide |
Cylindrée | 452 cc |
Alésage x course | 84 x 81,5 mm |
Soupapes/cylindre | 4 |
Taux de compression | 11,5:1 |
Alimentation | Injection électronique, corps de papillon de 42 mm, système ride by wire |
Embrayage | Multidisque en bain d’huile, à glissement assisté |
Boîte de vitesse | 6 rapports |
Transmission finale | Chaîne |
PRESTATIONS | |
Puissance maximum | 40 ch @ 8.000 tr/min |
Couple maximum | 40 Nm @ 5.500 tr/min |
ELECTRONIQUE | |
Moteur | Deux modes de conduite (Performance et Eco) |
Partie-cycle | ABS |
PARTIE-CYCLE | |
Cadre | Tubulaire en acier avec moteur porteur |
Suspension avant | Fourche télescopique Showa de 43mm |
Réglage | / |
Suspension arrière | Mono-amortisseur Showa |
Réglage | Précontrainte du ressort |
Débattement av/ar | 150/145 mm |
Frein avant | Un disque ventilé de 310 mm, étrier à 2 pistons à fixation axiale |
Frein arrière | Un disque ventilé de 270 mm, étrier à 1 piston |
Pneumatique av/ar | 120/70-17, 160/60-17 |
DIMENSIONS & POIDS | |
Empattement | 1.440 mm |
Angle de chasse | n.c. |
Chasse | n.c. |
Hauteur de selle | 780 mm |
Poids | 184 kg (huile + 90% de carburant) |
Réservoir | 11 litres |
PRIX | |
Prix | à partir de 6.049 € |