Trois Yamaha mythiques en Allemagne
Dernièrement, Cologne accueillait le salon de la moto Intermot “nouvelle formule”. En effet, après quelques années d’absence – suite à la pandémie de Covid – Intermot revient en devenant un salon annuel qui se déroulera chaque année en décembre.
Mais il faut bien reconnaître que ce salon est devenu l’ombre de lui-même. Mal programmé – un mois à peine après Milan – avec seulement deux palais à visiter, Intermot a du pain sur la planche pour retrouver son lustre d’antan. Néanmoins, les principaux constructeurs étaient présents, avec notamment Ducati qui dévoilait en première mondiale, la Multistrada V2.
Sur les différents stands, chaque marque présentait ses nouveautés. Mais chez Yamaha, qui fête ses soixante ans de présence en Allemagne, on pouvait également admirer quelques modèles emblématiques qui ont jalonné son histoire. Nous en avons sélectionné trois que nous vous présentons aujourd’hui.
Prélude
L’histoire de Yamaha débute en 1889, époque à laquelle son fondateur Torakusu Yamaha, crée la manufacture d’orgues Yamaha. En effet, cet ancien mécanicien d’horlogerie et d’instruments médicaux s’est reconverti dans la réparation et la fabrication d’orgues. Par la suite, il devient facteur de pianos et sa société, devenue entre-temps “Nippon gakki seizō” se met à fabriquer d’autres instruments de musique. Torakusu Yamaha décède en
Écoutez le bruit d’échappement de l’YA-1
Yamaha YDS-2 1962
Viennent ensuite d’autres modèles et notamment un bicylindre 2 temps de 250 cm3 baptisé YD1. Comme Yamaha est déjà bien impliqué et obtient de bons résultats dans les compétitions nationales, un modèle plus sportif YDS-1, est commercialisé fin des années 50. Cette moto est considérée encore aujourd’hui par Yamaha comme étant la première moto sportive à part entière du Japon. Et comme l’ancêtre de toutes les motos sportives à moteur 2 temps du constructeur aux trois diapasons.
En 1962 sort l’YDS-2, son moteur bicylindre en ligne 2 temps de 246 cm3 refroidi par air est dérivé de celui de l’YDS-1. Il développe 23 ch à 7 000 tr/min et 21 Nm à 6 000 tr/min. L’YDS-2 avec ses 156 kilos est à l’époque, la 250 japonaise la plus performante du marché. Elle sera la première Yamaha 250 importée en Europe. Et servira de base pour la première compétition-client, la 250 TD1A.
Yamaha XT500 1979 (Jean-Claude Olivier)
La Yamaha XT500 est au départ dérivée de la TT500, qui fait son apparition en 1975 aux USA. Développée par Yamaha USA, elle est destinée aux courses dans le désert, et est dépourvue d’éclairage et d’instruments comme le compteur. Mais elle a tapé dans l’oeil d’un certain Jean-Claude Olivier. Celui-ci n’est autre que le responsable du département moto chez Sonauto, qui distribue Yamaha en France. Il insiste auprès des Japonais qui acceptent finalement son importation dès 1976 en France. La Yamaha XT500 vient de faire son entrée en Europe.
Et ce gros mono tout-terrain arrive au bon moment. Les rallyes africains viennent de naître et le Français Gilles Comte remporte le Rallye Côte-Côte (Abidjan-Nice) en 1977 au guidon d’une Yamaha XT500 (en réalité la base est une TT500). C’est une réussite totale pour Yamaha qui place sept XT500 parmi les huit premiers. Sur cette même édition, un concurrent qui roule également sur une XT, s’égare pendant trois jours dans le désert. Il s’appelle Thierry Sabine et est l’organisateur de l’Enduro du Touquet depuis trois ans. Mais il deviendra surtout célèbre en mettant sur pied l’épreuve mythique du Paris-Dakar.
La première édition se déroule du au Gilles Comte, Christian Rayer, Rudy Potisek, et … Jean-Claude Olivier. Car oui, JCO comme on le surnomme, est un redoutable pilote. Pour l’anecdote, il participera à 25 éditions de l’Enduro du Touquet qu’il finira 15 fois dans les vingt premiers. Sur ce premier Dakar, il remportera d’ailleurs deux étapes avant d’abandonner. Le lendemain de sa seconde victoire d’étape, une fracture du bras l’empêche de prendre le départ. La victoire finale de cette première édition reviendra à un inconnu. Un dénommé Cyril Neveu, au guidon d’une Yamaha XT500. Il deviendra également célèbre en remportant cinq fois le Paris-Dakar.
La moto qui était présente sur le stand Yamaha à Intermot est la XT500 avec laquelle, Jean-Claude Olivier a participé au premier Paris-Dakar en 1979. D’après nos renseignements, Sonauto n’a pas touché au moteur, estimant que le mono de 32 ch était assez performant mais surtout très fiable pour une telle épreuve. Le travail de préparation a surtout porté sur la partie-cycle. À l’avant on retrouve une fourche et un garde boue du modèle cross YZ. À l’arrière, un bras oscillant de forte section rectangulaire et des amortisseurs Koni. Le réservoir de 33 litres en tôle est fabriqué sur mesure, l’échappement provient de la TT500 car il est beaucoup plus léger. Enfin, la selle est large et rembourrée pour que les pilotes gardent un certain confort sur les longues étapes du rallye. Dans cette configuration, la moto affiche un poids à sec de 125 kg (contre 139 pour la XT d’origine).
On retiendra enfin que JCO a participé à 9 Paris-Dakar. En plus de ses 2 victoires d’étape en 79, il terminera six fois l’épreuve : 7ème en 83, 6ème en 84, 2ème en 85, 12ème en 86, 11ème en 87 et 7ème en 88.
Yamaha TZ750 F 1979
La naissance de la Yamaha TZ750 est intimement liée aux 200 Miles de Daytona. Aujourd’hui la “Daytona 200” (sa véritable appellation) n’est plus très populaire, mais dans les années 70-80, c’était l’épreuve à gagner. Et toutes les marques japonaises s’y investissaient. Néanmoins chez Yamaha il y a un hic. Les motos admissent à Daytona devaient au moins être produites à 200 exemplaires. Et contre les Honda CB750, Kawasaki H2R, et autre Suzuki TR750 – toutes dérivées de motos de série – Yamaha n’avait rien à opposer. Qu’à cela ne tienne, en 1972 le constructeur aux trois diapasons décide carrément de fabriquer 200 exemplaires d’une moto de course.
Et c’est comme cela que la TZ750 est présentée au Salon de Tokyo fin 73. Son nom officiel est TZ750A, mais en réalité il s’agit plutôt d’une TZ700. Car en fait, Yamaha a ‘simplement’ accolé 2 moteurs de TZ350. La cylindrée exacte est de 694 cm3 et ce quatre cylindres en ligne 2T à refroidissement liquide développe 90 ch à 10 000 tr/min. Équipée d’une boîte de vitesses à 6 rapports, la TZ n’affiche que 156 kg à vide sur la balance. Giacomo Agostini qui vient de quitter MV pour la marque japonaise, remporte les 200 Milles de Daytona à son guidon. La carrière de cette fantastique moto de course est lancée, et elle glanera beaucoup de victoires et de titres durant une dizaine d’années.
La TZ750B apparaît en 1975, les 46 premiers exemplaires restent en 694 cm3, les 65 suivants passent à 747 cm3 par augmentation de l’alésage, ce qui porte leur puissance à 105 ch (10 500 tr/min). Viendront ensuite les séries C, D (3 sorties d’échappement à droite, suspension arrière cantilever, 120 ch à 10 500 tr/min), E (120 ch à 11 000 tr/min), et enfin la dernière série F en 1979 (c’est la version qui était exposée sur le stand). En tout, Yamaha produira 609 exemplaires de la TZ750.
Deux anecdotes sur la Yamaha TZ750
Jean-Claude Olivier, que vous connaissez maintenant, a l’idée complètement folle d’aligner une Yamaha TZ750 au Bol d’Or. Nous sommes en 1978, et le but de JCO est de réaliser un énorme coup de pub. Sur une course de 24 heures, il est impossible qu’une pure moto de vitesse tienne aussi longtemps. Ses deux pilotes vedettes, Patrick Pons et Christian Sarron réalisent sans difficulté la pôle et s’élancent pour le double tour d’horloge, en espérant animer la course quelques temps. Mais à la surprise générale, la moto va garder la tête pendant 17 heures avant d’abandonner. Le coup de pub de JCO est plus que réussi. L’année suivante, deux TZ sont engagées et si l’équipage Raymond Roche et Hubert Rigal ne termine pas, celui composé de Patrick Pons et Sadao Asami finira sur la deuxième marche du podium.
On connaît Kenny Roberts, pilote Yamaha, comme le premier américain a être devenu champion du monde en GP 500. Il le sera d’ailleurs trois fois de 1978 à 1980. Mais avant sa carrière en Europe, il a couru de longues années aux USA. Notamment dans le championnat AMA Grand National, qui comprend des courses sur piste et hors route avec le dirt track. À cette époque, ce sont en général des Harley-Davidson qui dominent cette discipline. Pour les contrer, Yamaha USA construit une machine de dirt track équipée d’un moteur de TZ750. Et c’est durant l’Indy Mile Grand National de 1975, que le King Kenny s’alignera au guidon de cette machine un peu dingue, pour remporter finalement l’épreuve. Il déclarera ensuite : “Ils ne me payent pas assez cher pour rouler avec ce truc”.