Vers les 4 caps de l’Europe avec la Versys 1100 : partie 1 – le Cap Oriental

Aller à l’extrême en passant par quatre extrêmes. Tel était le défi d’un périple de quelque 13 000 km. Pour agrémenter le voyage, nous nous sommes arrangés pour ne monter qu’un seul jeu de pneus sur la Kawasaki Versys 1100. Bridgestone promet en effet 47 % de kilométrage en plus pour le nouveau T33 par rapport à son prédécesseur, le T32. Le pneu avait déjà montré lors de notre 10 x 1000 km qu’il pouvait supporter cette distance….

Texte : Thierry Sarasyn

Quatre caps, 13 000 km

Mais 13 000 km, c’est bien sûr un peu plus. Surtout que les routes scandinaves ne sont pas souvent très lisses mais plutôt particulièrement accidentées. Et bien sûr, cela use aussi davantage les pneus et, pour ne rien arranger, notre reporter avait aussi un appétit difficile à assouvir pour les wheelings. Ce qui ne contribue pas non plus à améliorer la consommation. En revanche, nous n’avions aucun doute sur la Kawasaki. Dans sa version 1000cc, la Versys était déjà le partenaire de MotoActus.be pour le record du monde de 15 pays en un jour en 2023. Un an plus tard, nous l’avions testée lors d’un périple un peu fou vers Dakar. À bien des égards, il s’agit donc d’une aventurière de l’extrême.

Pour cette première partie, nous sommes partis de Belgique vers le point le plus à l’est de l’Europe continentale : le Cap Est de la Finlande, à Ilomantsi. Nous avons traversé sept pays, bravé la neige, le froid et les plaines sans fin. Un voyage plein de contrastes, de vitesse et… de silence.

De l’Allemagne à la Pologne

L’autoroute allemande est la terre promise de tout motard à l’âme sportive. Juste après Cologne, le trafic est devenu moins dense et le bitume était parfait. Il était temps d’ouvrir en grand avec la Versys. Le quatre cylindres grognait avec satisfaction tandis que le compteur de vitesse flirtait avec sa limite. Les pneus Bridgestone T33 étaient aussi à l’aise que la moto à haute vitesse : stables, prévisibles et avec une adhérence sans soupçon. L’adrénaline faisant place à la satisfaction, cette première mission était réussie.
En Pologne, nous avons choisi une route sans péage le long de la côte en direction de Gdansk. Le paysage était agréable, la route était bonne, et en plus : faire le plein n’était pas cher. Nous avons rempli nos jerrycans « au cas où », l’un de 5 litres, l’autre de 10. On ne sait jamais, surtout quand on roule vers le néant finlandais. Nous avons laissé Gdansk derrière nous, le temps était compté et l’aventure nous attendait bien plus loin encore…

Lituanie : une litanie !

La frontière lituanienne nous a accueillis dans le chaos avec des travaux qui supposaient clairement l’arrivée d’un nouveau poste frontière dans le futur. Mais au moment de notre passage, on ne savait pas encore à quoi ressemblerait celui-ci. Après la frontière, il y a eu… rien. Une route interminable, monotone, sans le moindre arrêt. Des kilomètres de ciel gris, de routes droites et de prairies. Mais là aussi, les T33 et la Versys ont excellé. Leur confort et leur stabilité sur de vastes étendues de route ont rendu la monotonie agréable. La Kawasaki nous a mis, pour ainsi dire, en transe. Rouler, sans rien d’autre que le bruit du vent et du moteur quatre cylindres dans les oreilles, sur une route qui nous mène tout droit vers un horizon insaisissable. Pour certains, c’est peut-être la définition même de la moto. Pour nous, d’une manière très originale, cela a été l’un des points forts de notre voyage vers le Cap-Oriental.

“Pour certains, c’est peut-être la définition même de la moto.“

Lettonie et Estonie : des excursions surprenantes

Riga, la capitale de la Lettonie, s’est profilée à l’horizon au moment où le soleil déclinait. Nous n’avons pas hésité : il était temps de faire une pause. La ville nous a surpris par son atmosphère vibrante, son architecture impressionnante et ses ruelles accueillantes. Nous avons garé la Versys dans le centre-ville. Nous avons bien mangé, bu une bière locale et profité d’une pause inattendue au milieu de notre expédition.
En Estonie, nous sommes arrivés à Tallinn plus tôt que prévu. Nous avons donc eu le temps d’explorer cette ville. La vieille ville est impressionnant avec son charme médiéval, ses pavés et ses tours. Après une autre petite visite de la ville, nous avons pris le ferry pour Helsinki. L’aventure s’est enfin déplacée en Scandinavie.

Helsinki : pluie, obscurité et… pavés

Les premiers kilomètres finlandais nous ont accueillis sous la pluie et dans l’obscurité. Helsinki était animée, encombrée et …parsemée de pavés. Pas de quoi s’amuser avec une moto chargée à bloc. Mais les pneumatiques T33 ont continué à adhérer sur toutes les surfaces et la Kawasaki a une fois de plus prouvé qu’elle était une moto merveilleusement contrôlable. Libres de tout souci, nous avons choisi de rouler en dehors de la ville, pour notre bivouac. Nous nous sommes garés sous un pont au bord de l’eau pour la nuit. Nous, dans ce cas, c’était votre serviteur et le photographe Manu De Soomer qui a fait le voyage dans un camping-car. Idéal pour tout capturer pour la postérité et les lecteurs de ce site web, mais aussi pour ne pas avoir à se soucier de trouver un hôtel. Nous avons campé où et quand nous le jugions nécessaire. Cette fois, notre lieu de repos était froid et humide, mais tranquille.

Imatra : de l’asphalte avec de l’histoire

Le lendemain, nous avons pris la direction d’Ilomantsi, le point le plus à l’est de l’Europe continentale – sans tenir compte de la Russie. Avec un arrêt obligatoire à Imatra. Tous les amateurs de sport mécanique connaissent cette ville qui a un illustre passé en compétition. Nous avons fait deux tours agréables du circuit routier ouvert à la circulation. La ligne droite avec les chicanes était fermée, mais l’atmosphère était palpable. Comme si l’asphalte était chargé d’histoire. Au bord du lac, nous avons pris des photos sur la grille de départ. Les habitants nous saluaient et nous encourageaient. Le sentiment d’appartenance à la moto est toujours bien vivant ici et, pendant un moment, je me suis sentis comme un héros de la belle époque, mais au guidon d’une moto bien moderne avec la Kawasaki Versys. Un peu d’imagination ne fait de mal à personne, n’est-ce pas ?

Jusqu’à la limite

Depuis Imatra, la route serpentait jusqu’à Ilomantsi. Une route ondulée, parfaite pour la Versys. Le soleil a commencé à se coucher lorsque nous avons emprunté une route de terre vers le Cap-Oriental pour les 25 derniers kilomètres. Ce qui avait commencé comme une route de gravier acceptable s’est rapidement transformé en un chemin enneigé. La température a chuté. A 2 km du but, nous nous sommes retrouvés coincés. Froid glacial. Neige.

“Nous avons regardé le coucher de soleil depuis le Cap-Oriental, les couleurs rose et orange reflétées sur la glace. Il n’y a rien ici, et c’est ce qui a rendu ce moment magique.”

A pied, donc, dans la neige finlandaise. Ce ne serait pas la dernière fois… Le « point le plus à l’est » se trouve sur un lac – à l’époque – gelé, accessible par une sorte de sentier de muletier. Des panneaux d’information dans toutes les langues, le silence tout autour. Il y a deux postes frontières sur l’îlot, symboliquement et littéralement la fin de l’Europe. Une cabane en bois sur pilotis et quelques bancs sont les seules installations disponibles. Nous avons regardé le coucher de soleil depuis le Cap-Oriental, les couleurs rose et orange reflétées sur la glace. Il n’y a rien ici, et c’est ce qui a rendu l’instant magique.

Retraite

Le retour a été plus délicat. La moto n’a pas atteint le sommet de la pente enneigée facilement. Mais quand on veut, on peut. Même si la route n’existe plus. Pensez-y un instant. Pousser, tirer, glisser, mais sans tomber. Euphorie ! Nous avons continué jusqu’à la ville la plus proche, à 50 km. Le soleil descendait lentement et le ciel brûlait dans toutes les nuances de feu. A l’arrivée, il faisait un froid de canard avec à peine 5 degrés. Le chauffage du mobil-home de mon photographe n’a jamais été aussi bienvenu.

La fin est le début

L’aventure en moto est rarement une question de destination, mais plutôt de chemin à parcourir pour y parvenir. Dans le cas présent, il s’agissait des deux. Le cap oriental de la Finlande n’est pas une destination classique pour les motards, mais le sentiment d’être là, seul, à la frontière de l’Europe, parmi la glace et le silence, était inoubliable. Ce qui a commencé à toute vitesse sur l’autoroute s’est terminé dans la paix et la tranquillité au bord d’un lac gelé. Un silence nécessaire pour nous préparer à la deuxième partie, vers le Cap Nord. Vous lirez tout cela la semaine prochaine, alors que notre reporter se trouve entre-temps – et avec un peu de chance – littéralement à l’autre bout du spectre de ce voyage : dans la chaleur espagnole, en route vers le Cap Sud, à Tarifa. A la semaine prochaine !

Photos : Manu De Soomer, motorsportspics.com

Notre reporter : Collin Ten Hartog