Essai MV Agusta Enduro Veloce: Surprenant !
C’est au début des années septante que le magnifique logo de MV Agusta s’est affiché sur une machine tout-terrain. À l’époque, il s’agissait d’un Scrambler de 350cc. Aujourd’hui, MV sort l’Enduro Veloce, une allroad trois cylindres vraiment hors du commun. S’agit-il d’un chef-d’œuvre du design et de l’ingénierie italiens ou plus simplement d’une moto “tendance” ? Nous sommes allés en Sardaigne pour trouver la réponse.
Texte : German Ooms
Rolls
Les tendances du marché poussent parfois les fabricants à des actes les plus fous. Dans le monde de l’automobile, on constate que presque tous les constructeurs sont “obligés” de construire des SUV. Cela donne lieu aux créations les plus étranges. La Rolls Royce Cullinan en est un exemple frappant. Une tentative désespérée de combiner les caractéristiques stylistiques uniques d’une Rolls avec l’allure “aventureuse” d’un SUV. Un comble… et surtout un véhicule à mettre dans la liste des voitures les plus laides de tous les temps !
Peu probable
La Cullinan est la première chose à laquelle j’ai pensé lorsque MV a annoncé, il y a quelques années, que deux motos allroads viendraient bientôt s’ajouter à sa gamme. Je m’entends encore dire : “La firme légendaire MV Agusta, la marque de motos de course la plus couronnée de tous les temps, se perd elle aussi”. On parlait d’un bicylindre 500 cm3 construit en Chine ( !) et d’un trois-cylindres de 900 cm3. Comme souvent chez les italiens, le mot “bientôt” était vraiment à prendre avec des pincettes et, très vite, ce projet est devenu très discret. Surtout après la prise de pouvoir de KTM, l’avenir des MV surpuissantes semblait très sombre. KTM et son propriétaire Stephan Pierer (qui détenait désormais 51 % des parts de MV) n’appréciaient pas du tout ces machines allroads. Presque tout le monde pensait qu’il allait bannir ces modèles du portefeuille de MV. La 500 a effectivement été abandonnée, mais le trois cylindres a été développé plus avant et a donc été présenté en première mondiale ici en Sardaigne.
Presque une LXP Orioli
Cette Enduro Veloce est le deuxième modèle d’une série de nouvelles motos qui seront basées sur la même plate-forme. Fidèle à sa tradition, MV a commencé par une édition limitée. Elle a été baptisée LXP Orioli et ne sera produite qu’à 500 exemplaires. Ces motos ont apparemment toutes déjà été vendues et il était donc grand temps de présenter l’Enduro Veloce “normale”. Cette dernière est presque identique à la LXP Orioli, à l’exception des coloris et de quelques détails.
La MV Enduro Veloce est vendue pour la somme non négligeable de 24 720 €. Ce n’est pas donné, surtout quand on sait qu’elle n’a rien de très spécial sur le plan technique. C’est donc avec la plus grande curiosité que j’aborde cet essai. Avec une hauteur de selle réglable de 850 à 870 mm et un poids à sec de 224 kg, la MV n’est pas une petite moto, mais instinctivement, la répartition statique des masses est bonne. Avec le réservoir surélevé de 20 litres, on est assis plus à l’intérieur que sur la moto. Mais il y a beaucoup d’espace pour les jambes et le guidon large, légèrement incurvé vers l’arrière, tient bien dans les mains. La selle recouverte d’alcantara n’est pas seulement belle, elle est aussi spacieuse et offre un bon soutien. La finition générale est également réussie
Une électronique de haut niveau
Avant de donner vie au nouveau trois-cylindres de 931 cm3, je jette un coup d’œil rapide à l’électronique embarquée réglable via le tableau de bord TFT assez clair de 7 pouces et les boutons de sélection pratiques situés sur les commodos. Comme on peut s’y attendre, les aides électroniques ne manquent pas : contrôle de traction avec pas moins de 8 réglages, quatre modes de conduite (Urban, Touring, Off-road, All-terrain), Launch Control, ABS en virage, Cruise control, … et ainsi de suite.
Festival à bord …
Il suffit d’appuyer sur le starter pour que le moteur trois-pattes prenne vie. Les pièces que le nouveau moteur a en commun avec le trois-cylindres déjà existant se comptent sur les doigts d’une main. Comme pour le 798 cm3, le 931 possède un vilebrequin contrarotatif. Le but est de compenser le couple de rotation des autres pièces tournantes (comme les roues). On peut s’interroger sur ce choix technique pour une moto allroad. Au moins, cela rend déjà cette moto exclusive. L’embrayage à commande hydraulique demande un certain effort pour être actionné, mais il est facile à doser, notamment grâce au levier réglable. Le son du moteur à trois pistons est agréable mais peu perceptible.
L’échappement comporte une soupape à commande électronique qui, selon MV, rend le moteur plus facile à utiliser. Je n’en doute pas, cette soupape a certainement dû faire ses preuves au moment de l’homologation. En effet, la sonorité relativement discrète du moteur change radicalement dès que l’on ouvre les gaz. On obtient alors un son si beau et si impressionnant que l’on casserait sa tirelire rien que pour cela. Surtout lorsqu’on accélère fortement en passant les rapports avec le quickshifter qui fonctionne bien, c’est un véritable festival à bord de la MV. Je n’arrive pas à comprendre comment cette Enduro Veloce a été homologuée avec un tel échappement !
C’est plus qu’il n’en faut
Le moteur de 931 cm3 développe une puissance maximale de 124 ch à 10 000 tr/min, ce qui permet à la MV de faire mieux que, par exemple, la Tiger 900 (108 ch à 9 500 tr/min). Même le trois-cylindres CP3 Yamaha ne fait pas mieux avec 119 ch à 10 000 tr/min. Plus impressionnant encore, le couple maximal de 102 Nm à seulement 7000 tours/minute. À 3 000 tr/min, 85 % de ce couple est déjà disponible. Ces chiffres se traduisent clairement dans la pratique. Le moteur se distingue par sa vivacité et son agilité. Associé à l’étagement bien choisi des six rapports de la boîte de vitesses, il donne des ailes à l’Enduro Veloce.
Cette moto ne laisse aucun doute quant à ses ambitions et, grâce à ses performances impressionnantes, elle se place immédiatement entre les machines allroads de milieu de gamme et les ténors de la catégorie. Certes, la puissance de 124 ch est insuffisante pour surpasser, par exemple, la KTM 1290 Super Adventure (160 ch/8.750 tr/min). Mais comme vous le savez tous (mais ne voulez pas toujours l’admettre …) la puissance à l’état pur n’est pas seule à être prise en compte. La douceur de ce nouveau trois-cylindres est impressionnante. Sauf, peut-être en dessous de 4 000 tr/min, où elle aurait pu être un peu meilleure, mais sinon, on ne peut pas reprocher quoi que ce soit à ce nouveau moteur MV.
Un peu de patience
Notre essai de 240 km à travers la Sardaigne s’est déroulé dans des conditions parfaites. Il faisait sec et chaud, le bitume était parfait et notre ouvreur connaissait la région comme sa poche. Par conséquent, je n’ai pas eu besoin de tester les différents modes de conduite. J’ai roulé à 90% en mode Touring. Ce mode permet d’exploiter pleinement le potentiel du trois-pattes et c’était tout simplement parfait. Sur quelques courts tronçons du parcours, je suis passé en mode tout-terrain. La réponse à la poignée d’accélérateur était alors un peu plus calme et l’antipatinage disposait d’un peu plus de liberté. L’ABS pouvait également être partiellement ou totalement désactivé.
En mode Custom All-Terrain, il est possible d’affiner les réglages en ajustant la réponse de la poignée d’accélérateur et le frein moteur, par exemple. Les options de l’électronique sont très étendues et MV mérite également un grand bravo pour le bon fonctionnement de celle-ci. Avec des menus très clairs, un fonctionnement logique et un tableau de bord bien agencé, l’électronique n’a jamais été une source d’ennui. Ce qui peut parfois être le cas. Néanmoins, le temps de démarrage de l’électronique pourrait être amélioré. En effet, après avoir appuyé sur le bouton marche-arrêt (la MV est utilisable sans clé), il faut un certain temps avant de pouvoir démarrer le moteur. Sur les longs trajets, ce n’est pas un problème, mais pour ceux qui utiliseront beaucoup leur MV sur de courtes distances, ce sera probablement moins agréable.
Des composants de haute qualité
MV Agusta n’a pas non plus pris de risques lors du développement du châssis. Bien qu’il soit plutôt simple comparé, par exemple, à la nouvelle BMW R 1300 GS, l’ensemble fonctionne parfaitement. Les suspensions Sachs entièrement réglables à l’avant et à l’arrière ont de base, une bonne configuration et offrent une maniabilité excellent qui inspire confiance. Durant cet essai, nous avons roulé à plus de 90% sur la route, et à aucun moment je n’ai pris le châssis en défaut. Même avec une roue avant de 21 pouces, cette machine se comporte avec précision et confiance. L’Enduro Veloce est équipée de série de pneus Bridgestone Battlax A41. Ceux-ci ont été tout sauf décevants.
Ceux qui souhaiteront utiliser leur MV davantage en tout-terrain feraient bien de monter les AX41, également homologués pour cette machine. Il faudra alors ajuster les suspensions, car de base, elles sont beaucoup trop rigides pour une utilisation tout-terrain. Nous avons également pu tester une Enduro Veloce avec les AX 41 et les suspensions réglées pour l’off-road. Une réussite, en particulier avec le mode de conduite tout-terrain, la réponse à la poignée d’accélérateur est particulièrement dosée et on peut pratiquement rouler au pas sans aucun problème. La plage de réglage des suspensions Sachs est ample. Avec un ensemble de freins Brembo Stylema et deux disques de 320 mm à l’avant, le système de freinage de la MV est également parfait.
De la critique à l’émerveillement
J’ai abordé cet essai de manière très critique, mais l’Enduro Veloce m’a positivement surpris sur toute la ligne. Il s’agit d’une moto très homogène, extrêmement polyvalente, avec un moteur et un châssis de très haut niveau. Des points à améliorer ? Oui, par exemple, l’absence de pare-brise réglable est incompréhensible. De même, la différence de couleur entre le cache transparent situé sous le pare-brise et le pare-brise lui-même n’est pas acceptable. Ce cache est également très difficile à nettoyer à l’intérieur. D’autres détails gênants sont également l’accessibilité difficile de la commande des clignotants et la procédure fastidieuse pour le réglage de la hauteur de selle. Avec tout cela, je pense avoir fait le tour. L’Enduro Veloce en vaut-elle la peine ? C’est une autre question.
Avec une MV Agusta, vous payez toujours un peu l’image de marque. À vous de voir, si vous êtes prêt à mettre le prix pour une moto très performante et exclusive. Une Rolls Royce Cullinan n’est pas à votre portée ? Alors cette MV Agusta Enduro Veloce sera une excellente alternative !
Les + | Les – |
Moteur fantastique | Pare-brise non réglable |
Bonne électronique | Pas de réglage électronique des suspensions |
Exclusivité | |
Sonorité envoutante |
Données techniques et prix de la MV Agusta Enduro Veloce
MOTEUR
Type : Trois-cylindres en ligne 4 temps à refroidissement liquide, 12 soupapes, DOHC
Cylindrée : 931 cm3
Alésage x course : 81 mm x 60.2 mm
Taux de compression : 11.4:1
Embrayage : multidisque en bain d’huile
Boîte de vitesse : à 6 rapports
Transmission finale : par chaîne
PRESTATIONS
Puissance maximum : 124 ch (91 kW) @ 10 000 tr/min
Couple maximum : 102 Nm @ 7000 tr/min
ELECTRONIQUE
Moteur : Contrôle de traction (8 positions), launch control, contrôle du frein moteur (2 positions), quickshifter, régulateur de vitesse
Partie-cycle : ABS en virage (Continental MK100), IMU à 6 axes
CHÂSSIS
Cadre : double berceau en acier au chrome-molybdène
Suspension avant : fourche inversée Sachs de 48 mm
Réglage : entièrement réglable
Suspension arrière : Monoshock Sachs
Réglage : entièrement réglable
Débattement av/ar : 210/210 mm
Frein avant : deux disques de 320 mm, étriers Bembo Stylema à 4 pistons
Frein arrière : un disque de 265 mm, étrier à double piston
Pneumatique av/ar : 90/90 – 21, 150/70 – R18 Bridgestone Battlax A41
DIMENSIONS
Empattement : 1610 mm
Angle de chasse : nc
Chasse : 118 mm
Hauteur de selle : 850/870 mm
Réservoir : 20 litres
Poids à vide : 224 kilos
PRIX
à partir de 24.720 €