Essai Yamaha XSR 900 GP
Roberts. Lawson. Rainey. Ce sont quelques-uns des noms qui me viennent à l’esprit lorsque je contemple la Yamaha XSR 900 GP si brillante sous le soleil portugais. Sous certains angles, cet hommage est plus que réussi. Et la couleur rouge fluorescente Marlboro fait le reste.
Texte : Pieter Ryckaert
Le développement de la XSR 900 GP a pris un certain temps. Il y a d’abord eu la pandémie et ensuite, c’est surtout le département financier de la marque aux trois diapasons qui a freiné des quatre fers. À une époque où les marges bénéficiaires sont la règle plutôt que l’exception, équiper un modèle existant d’un carénage plutôt compliqué, de nombreux détails “inutiles” et de couleurs pratiquement peintes à la main est une chose à laquelle les gratte-papiers ne peuvent que dire “niet”.
Goupille
Mais elle est là. Et en chair et en os, je suis tout de suite beaucoup plus convaincue que les premières images de presse tombées dans ma boîte mail. Seuls les rétroviseurs sont un peu ratés, mais ce n’est pas grave. C’est une question de goûts et d’arguments. De trois quarts arrière surtout, je trouve que le carénage est très réussi, y compris les fixations à goupille du haut et le tableau de bord TFT sur lequel on ne peut choisir qu’un grand tachymètre à l’aspect analogique. La seule chose qui manque, c’est le son strident du moteur à deux temps.
Réglages
La XSR 900 GP se contente du moteur CP3 homologué Euro5+ tel qu’il existe aujourd’hui sur la MT-09 et (pas encore) sur la XSR. Et il n’y a absolument rien à redire à cela. Comme le veut le slogan “Masters of Torque”, il n’est pas nécessaire de chercher une plage de puissance précise, et encore moins de la craindre comme l’ont fait les Lawson et consorts. Et si cela s’avère vraiment nécessaire, vous disposez d’un excellent quickshifter pour vous aider. La seule modification apportée au moteur par rapport à la XSR et à la MT-09 est que les points d’encrage sont plus rigides. Vous disposez également de trois modes de conduite (rain, road et sport) et de deux autres modes de conduite personnalisables pour ceux qui aiment régler manuellement l’antipatinage et l’ABS sensibles à la l’inclinaison, ainsi que le frein moteur. Vous pouvez d’ailleurs le faire via l’application MyRide, simplement à partir de votre téléphone, où et quand vous le souhaitez. Wayne Rainey, au vu de son destin tragique, ne peut qu’en avoir rêvé sur sa YZR…
Bracelets
En revanche, le châssis a fait l’objet d’une attention toute particulière. Les suspensions KYB sont entièrement réglables à l’avant et à l’arrière, jusqu’à l’amortissement en compression et en détente. Un maître cylindre de frein radial de 61 mm et une durite de frein avant légèrement plus fine permettent également d’améliorer le freinage. Et à en juger par les guidons bracelets montés au dessus du té de fourche, qui sont néanmoins 10 cm plus bas que le guidon de la XSR 900, vous obtenez une moto assez différente en termes de maniabilité. Un jeu de pneus Bridgestone S23 complète le tableau.
Un rêve d’enfant
En m’asseyant sur la selle légèrement plus haute que sur la XSR (pour rattraper une partie de la distance qui sépare le pilote des repose-pieds montés plus hauts et plus reculés), certaines choses me traversent l’esprit. Le haut du carénage et le tachymètre rétro TFT donnent vraiment l’impression d’être dans les années 80/90. L’époque où, adolescent boutonneux, je suivais avec rage les GP500 et rêvais des motos de cette époque. J’ai l’impression qu’un rêve d’enfant est en train de se réaliser. Je réprime l’envie de pousser la XSR, comme c’était le cas pour les départs de GP jusqu’à la fin des années 1980, et je me contente d’appuyer sur le bouton de démarrage. Sur le commodo gauche, je manoeuvre le joystick qui fais brièvement défiler les infos (le cadran Yamaha d’antan appartient heureusement au passé), mais à part la navigation connectée au téléphone portable, il n’y a rien de mieux que ce tachymètre à l’allure analogique.
Soulagement
La position de conduite est résolument sportive. Pas autant que, disons, la R7, mais suffisamment pour m’obliger à soulager mes poignets après quelques kilomètres dans un trafic assez dense en appuyant mon bras gauche sur le réservoir. Cela me rappelle beaucoup de souvenirs de mes premières sorties sur des motos des années 90 qui étaient toujours extrêmement sportives. Le fait qu’après une demi-journée de conduite, je sens également que le cou est endolori au passage de la moindre bosse, ne me fera pas penser que c’est un inconvénient de la XSR GP mais plutôt quelques chose à classer dans la rubrique des “bons souvenirs”.
Cuir intégral
Les bracelets sont assez large, ce qui se traduit par une direction très souple. Ce n’est pas comme sur la MT-09, qui avec son grand guidon joue sur un effet de levier plus important, mais votre genou se dirige vers le macadam, pour ainsi dire en douceur. D’ailleurs, je me demande depuis combien de temps je n’ai pas roulé en combinaison de cuir sur la voie publique. Assez longtemps pour ne pas m’en souvenir. Où sont les jours où je n’avais dans mon armoire, qu’une combinaison de cuir une pièce et une salopette de pluie ? Et que j’essayais de toucher le sol avec mes genoux à chaque sortie. Et ce, après des années d’entraînement en tant que jeune fanatique de GP, accompagnant mes héros à l’arrière du divan…..
Sans aucune crainte
Le moteur n’a plus besoin d’éloges. Les 119 ch suffisent à combler tous les désirs que votre poignet droit envoie vers le trois-cylindres et je le laisse en mode “sport” toute la journée. C’est la nature de cette bête. Le châssis est meilleur que celui de toutes les MT-09 que j’ai déjà pilotées (la dernière version n’en fait pas encore partie), même si l’arrière mériterait un peu plus de précontrainte et un peu moins d’amortissement en détente. Non pas que la XSR puisse être à côté de la plaque, mais il s’agit de sensations personnelles. En roulant sur l’impressionnant circuit d’Estoril, malheureusement juste sur la moitié du tracé pour les photos, les S23 se montrent également sous leur meilleur jour. Dès le premier virage, le genou touche le sol sans aucune crainte.
MacKenzie
Je m’entretiens très brièvement avec Niall Mackenzie, l’Écossais qui a piloté une YZR500 Marlboro en tant que pilote d’usine en 1989. La XSR est-elle meilleure que la YZR de l’époque ? “Pour commencer, les pneus sont meilleurs que les pneus slicks de l’époque. Les freins sont beaucoup plus puissants et les suspensions sont meilleurs que les Öhlins qui étaient pourtant les meilleurs à l’époque. La YZR était évidemment plus rapide avec quelque chose comme 160 ch pour un poids de 120 kg, mais vous deviez craindre pour votre vie à chaque sortie de virage. La XSR est beaucoup plus facile à piloter et dispose d’un panel de systèmes de sécurité électroniques qui, à l’époque, semblait réservé à Buck Rogers. Sur la YZR, je n’avais que mon poignet droit, l’embrayage en cas d’extrême urgence et de temps en temps un peu chance …“
Conclusion
Malheureusement, les routes portugaises ne sont pas le top en termes de circulation, beaucoup de travaux et asphalte de mauvaise qualité ne rendent pas le reste de la balade vraiment mémorable. C’est un peu triste, mais cela donne lieu à de délicieuses réflexions sur les temps révolus où les machines GP glaçaient le sang, tant en termes de conduite que d’esthétique. L’époque où, en cuir intégral, on n’était arrêté que par l’envie de fumer une Marlboro plutôt que par un énième contrôle de vitesse ou un embouteillage. C’est ce que la XSR 900 GP vous fait ressentir. En s’asseyant sur la selle ou en la regardant de loin, on se rend compte qu’il s’agit d’une excellente moto avec ses caractéristiques propres. À sa manière, cette moto ne fait que vous donner l’eau à la bouche …
Données techniques
MOTEUR
Type : trois-cylindres, 4 T, à refroidissement liquide, DACT, 4 soupapes
Cylindrée : 890 cm3
Alésage x course : 78 x 62,1 mm
Taux de compression : 11.5 : 1
Embrayage : multidisque en bain d’huile
Boîte de vitesse : à 6 rapports
Transmission finale : par chaîne
PRESTATIONS
Puissance maximum : 119 ch (87,5 kW) @ 10.000 tr/min
Couple maximum : 93 Nm @ 7.000 tr/min
ELECTRONIQUE
Moteur : 5 modes de conduite
Partie-cycle : ABS et contrôle de traction sensibles à l’inclinaison, contrôle de wheeling, contrôle de glissement
CHÂSSIS
Cadre : type Diamant
Suspension avant : fourche inversée KYB de 43 mm
Réglage : entièrement réglable
Suspension arrière : monoshock KYB
Réglage : entièrement réglable
Débattement av/ar : 130/131 mm
Frein avant : deux disques de 298 mm, étriers radiaux à 4 pistons
Frein arrière : un disque de 245 mm, étrier à 2 pistons
Pneumatique av/ar : 120/70-ZR17 / 180/55-ZR17
DIMENSIONS
Empattement : 1.500 mm
Angle de chasse : 25°20
Chasse : 110 mm
Hauteur de selle : 835 mm
Réservoir : 14 litres
Poids TPF : 200 kg
PRIX
à partir de 13.699 €